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mardi 21 juin 2011

La procureure refuse de requérir contre Olivia Zemor , qui était poursuivie , avec son association pour le boycotte d'Israël : un magistrat honnète , une femme d'une extraordinnaire probité


Refusant de céder aux pressions gouvernementales, la procureure de la 17ème chambre correctionnelle du tribunal de Paris s’en est remise à la sagesse des juges, dans le procès où Olivia Zémor, présidente de CAPJPO-EuroPalestine, était poursuivie pour avoir mis en ligne la vidéo d’une action de boycott d’Israël (BDS) conduite à Evry (Essonne) en juillet 2009. Le jugement sera rendu le 8 juillet prochain.
Comme on le sait, le réquisitoire du procureur, représentant de l’accusation dans la salle, est un moment-clé de tout procès pénal. Dans la majorité des cas, le procureur, qui intervient vers la fin de l’audience, s’appuie en effet sur le dossier d’accusation, et demande aux juges de prononcer une peine, plus ou moins importante.
Mais les procès intentés aux militants de la campagne Boycott Israël (à Perpignan, Pontoise, Mulhouse, Bobigny, etc.), alors que des appels à boycott de la Chine, du Mexique, du Canada ou encore de la Birmanie sont proposés sans problème à l’opinion publique et aux consommateurs, n’existent en France que par la seule volonté du lobby israélien et de son odieux chantage à l’antisémitisme.
Ce n’est en effet que pour complaire à ce lobby (dont quatre officines, avec leurs avocats, étaient présentes vendredi sur les bancs de la partie civile), que le pouvoir politique français, à travers l’ex-ministre Michèle Alliot-Marie (dégagée du gouvernement il y a quelques mois à cause de ses liaisons douteuses avec le régime du dictateur tunisien Ben Ali), a engagé des poursuites contre les militants BDS depuis 2010.
Mais la magistrature n’est heureusement pas uniquement composée d’auxiliaires serviles de la volonté gouvernementale, et on a pu vérifier vendredi qu’il y a encore dans ce pays des esprits indépendants, y compris dans ce qu’on appelle la « magistrature debout » (les représentants de l’accusation, par opposition aux juges proprement dits, qui forment la « magistrature assise »). Autrement dit, des gens qui continuent de penser que tout accusé a droit à un procès équitable, et qui entendent se forger une opinion par eux-mêmes, après avoir vu les pièces et entendu les débats.
La très courte déclaration de la procureure, qui a indiqué que le Parquet de Paris ne suivait pas les instructions de la chancellerie et ne demandait aucune condamnation contre l’accusée – malgré les menaces à peine voilées proférées à l’audience par le lobbyiste israélien Goldnadel- fut donc l’un des temps forts d’une audience par ailleurs passionnante en tous points.
Ne cachant pas leur intérêt pour ce qui promettait d’être le premier débat de fond sur la campagne de boycott d’Israël devant une cour de justice, conscient aussi de la mobilisation suscitée par la scandaleuse poursuite à l’encontre d’Olivia, le président du tribunal et ses deux assesseurs s’étaient préparé à une séance longue. De fait, commencée à 15h30, la séance ne fut levée qu’à 1 h du matin, après le passage du dernier métro !
Nous n’avons pas été déçus, en tout cas les 150 d’entre nous qui avaient réussi à trouver une place dans la salle, tandis que des dizaines d’autres sympathisants de la cause du peuple palestinien étaient contraints d’attendre devant la porte qu’une petite place se libère pour pouvoir entrer à leur tour.
Selon notre pointage, près de 300 personnes, dont une grande partie de la première à la dernière minute, se sont mobilisées vendredi en défense d’Olivia. Jeunes ou vieux, franciliens, provinciaux et belges levés de bonne heure, ces hommes et ces femmes forçaient le respect de la cour par leur calme, leur détermination, leur extrême attention surtout, malgré la durée et la chaleur estivale. Qu’ils en soient ici remerciés de tout cœur.
Félicitations et remerciements aussi aux 9 témoins de la défense, venus parfois de loin, et privés d’une bonne partie des débats puisque, règlement oblige, les témoins sont « enfermés » dans une salle annexe tant qu’ils n’ont pas eux-mêmes été appelés à déposer à la barre.
Merci d’abord à Hajo Meyer, survivant juif d’Auschwitz aujourd’hui âgé de 86 ans, venu d’Amsterdam en Hollande. Après avoir dénoncé l’odieux amalgame pratiqué par les dirigeants israéliens entre antisionisme et antisémitisme, témoin de l’avènement du régime hitlérien dans son Allemagne natale, Hajo s’attacha à argumenter son soutien au boycott d’Israël, notamment le boycott de ses institutions universitaires. L’Université israélienne, exposa-t-il, porte une lourde responsabilité dans la fabrication du poison raciste qui infeste la société israélienne, et des outils de répression "scientifique" aux mains de l’armée. Sa complicité est encore plus grande quand on sait qu’elle n’a jamais levé le petit doigt pour s’opposer à la politique de l’armée d’occupation pour empêcher la jeunesse palestinienne d’exercer son droit fondamental à l’éducation.
Merci ensuite à Liliana Cordova, animatrice de l’IJAN (Réseau international des Juifs anti-sionistes). Franco-argentine, Liliana a vécu 14 ans en Israël, qu’elle a fini par quitter, dégoûtée par le racisme et la ségrégation ambiants. Son association, l’IJAN, était partie prenante à l’action d’Evry, que Liliana a fièrement revendiquée à la barre.
Merci aussi à Omar Soumi. Ce jeune universitaire franco-palestinien était en 2009 le président de Génération Palestine, une des associations cosignataires de la vidéo d’Evry, mise en ligne elle aussi sur son site. Le président du tribunal se montra particulièrement attentif, lorsqu’Omar, avec calme, raconta comment l’armée israélienne lui a interdit, au poste dit « frontière » qui sépare la Jordanie de la Cisjordanie occupée, de rendre visite à sa propre famille palestinienne.
Merci encore à Eric Hazan, des éditions La Fabrique, qui s’étonna de ne pas être lui-même poursuivi, alors qu’il a sorti il y a un an un livre entier consacré au boycott d’Israël, « Le BDS », du militant palestinien Omar Barghouti. Eric Hazan connait bien les parties civiles, puisque ce sont les mêmes qui avaient tenté, il y a quelques années, de faire condamner un autre ouvrage critique de la politique israélienne édité par La Fabrique, la passionnante « Industrie de l’Holocauste » de l’Américain Norman Finkelstein. Il est vrai qu’Eric Hazan avait gagné le procès Finkelstein haut la main, et que Goldnadel n’a pas forcément envie de recommencer.
La sénatrice Alima Boumédiene-Thiery, autre cible privilégiée du lobby sioniste et du gouvernement de Sarkozy (une première poursuite ayant été déclarée nulle par le tribunal de Pontoise, Alima est néanmoins reconvoquée par la police judiciaire !) rendit compte de l’émotion soulevée par ces atteintes à la liberté d’expression y compris dans les milieux parlementaires. Elle informa le tribunal de la pétition signée en sa faveur par des centaines de députés et sénateurs, y compris d’élus appartenant à la majorité. Elle rappela également qu’en qualité de députée au parlement européen, elle fut l’initiatrice de la résolution adoptée le 10 avril 2002, exigeant la suspension des privilèges accordés par l’Union européenne à Israël, résolution que les gouvernements –dont le gouvernement français, cela va sans dire- refusèrent anti-démocratiquement de mettre en œuvre. Dès lors que les gouvernements refusent d’appliquer le droit, de quels autres moyens, sinon le boycott, les citoyens disposent-ils ?, demanda-t-elle au tribunal.
Alain Krivine, ancien député européen, lui aussi, et animateur historique de la LCR et désormais du NPA, revendiqua sa part de responsabilité dans l’action à l’hypermarché Carrefour d’Evry, dont la vidéo fut pareillement mise en ligne sur le site internet de son parti. Taquin, il fit également remarquer au tribunal que le NPA, dans les professions de foi de ses candidats aux élections européennes de 2009, s’était prononcé noir sur blanc pour le boycott d’Israël , tant que cet Etat ne respecterait pas les droits élémentaires du peuple palestinien. Petite précision : de tels documents électoraux sont de par la loi préalablement visés par les services du ministère de l’Intérieur, qui a la faculté de censurer des textes comportant des mentions illégales, incitant à la discrimination raciale pour prendre un exemple « au hasard ». Il n’en avait rien été, et les rotatives du NPA imprimèrent tranquillement la bagatelle de 90 millions de ces professions de foi, routées ensuite aux électeurs aux frais de l’Etat, comme prévu par la loi !
Ghislain Poissonnier, magistrat professionnel actuellement en disponibilité, détaché un temps auprès du CICR (Comité International de la Croix-Rouge) en Cisjordanie occupée, exposa synthétiquement le contenu d’une note sur la licéité du boycott, qu’il a publiée récemment dans un recueil du Dalloz, la « Bible » française en matière de doctrine juridique. Il insista en outre sur les obligations de l’Etat français lui imposant, en droit, de prendre des sanctions contre les personnes ou Etats violant le droit international, ce qui est le cas d’Israël au regard d’une série de textes, à commencer par les Conventions de Genève.
Le Professeur de droit Géraud de la Pradelle, avant-dernier des neuf témoins cités par la défense, expliqua le contenu et la portée des Conventions de Genève, ainsi que celui du jugement délivré par la Cour Internationale de Justice qui, le 9 juillet 2004 à La Haye (Pays-Bas), condamna à l’unanimité (moins la voix du représentant israélien) la construction du mur de l’annexion en Cisjordanie. « Une très large majorité, dans la communauté des juristes internationaux, ne comprennent pas pourquoi Israël, malgré les nombreuses résolutions condamnant ses actions, échappe à toute sanction », résuma-t-il.
Enfin, Mgr Jacques Gaillot, 75 ans (« je suis né en 1935, un 11 septembre si vous voulez tout savoir ») réaffirma son soutien à la campagne de boycott, et plus généralement son propre combat pour que le peuple palestinien obtienne justice et liberté.
Qu’on excuse maintenant l’auteur de ces lignes, qui a pourtant pris pas mal de notes, s’il a du mal à restituer de manière cohérente les propos des quatre avocats des associations sionistes (Charles Bakkouche pour son client, l’inénarrable Sammy Ghozlan du BNVCA ; Gilles-William Goldnadel pour son client l’association France-Israël dont il est lui-même le président ! ; Aude Weill-Raynal, du cabinet Goldnadel, pour son client l’association Avocats Sans Frontières présidée par un certain … Goldnadel ! ; et Stéphane Markowicz, pour la Chambre de commerce France-Israël).
La difficulté, c’est que le terrain d’activité privilégié par les officines sionistes, ce n’est pas le débat public, mais les pressions, dans le cadre d’entretiens privés, sur les responsables politiques, voire judiciaires. Alors, quand ils arrivent au tribunal, convaincus que c’est déjà « dans la poche » puisqu’ils ont l’échelon politique avec eux, ils ont tendance à penser que l’étalage de leur arrogance sera suffisant, l’audience n’étant de leur point de vue qu’une formalité. D’où une succession de propos, tantôt injurieux, tantôt aberrants (une pensée particulière, ici, pour Markowicz, qui a tenté de semer le doute sur la réalité du calvaire vécu par Hajo Meyer sous le nazisme ; Markowicz avait déjà fait le coup à Bordeaux face à notre ami Maurice Rajsfus, autre rescapé du génocide). On retiendra aussi des parties civiles leur gloutonnerie, ou plus sérieusement dit, leur volonté de frapper CAPJPO-EuroPalestine au portefeuille : chacune de ces associations demande ainsi de 10.000 à 15.000 € de dommages et intérêts, et plus 3.000 à 4000 € par avocat pour « frais de justice » (soit plus de 50.000 euros au total !!).
A noter, enfin, au chapitre des parties civiles, ce moment ubuesque où Goldnadel, conscient de la faiblesse de son propre talent oratoire, se lança dans la lecture des élucubrations du nommé Taguieff, un pseudo-chercheur, pape auto-proclamé de « la nouvelle judéophobie », celle des « islamo-gauchistes » s’entend.
Les plaidoiries des trois avocats de la défense ont été d’un tout autre niveau, démontant point par point les mensonges de la partie adverse, mais aussi le rôle peu reluisant de l’Etat français dans cette affaire.
Me Henri Choukroun a notamment démontré le caractère parfaitement raciste et ségrégationniste de l’Etat d’israël, qui ne se gêne pas de son côté pour appeler au boycott de nations et de firmes dès qu’elles refusent d’adhérer à sa politique. Il a également souligné les lettres de noblesse du boycott dans l’histoire.
Me Dominique Cochain a magistralement envoyé dans les cordes les avocats de la partie civile en démontrant leurs liens avec l’extrême-droite et des personnalités fascistes. Elle a expliqué à tous ceux qui font semblant de s’étonner de l’empathie dont jouit le peuple palestinien, que si de nombreux autres peuples sont victimes d’injustices et comptent parfois davantage de morts et de blessés, seul le peuple palestinien, subit l’extraordinaire déni du statut de victimes, puisque il est de bon ton de le présenter régulièrement comme le responsable de tous les maux et de tous les crimes de guerre dont il souffre.
Me Antoine Comte, dans une plaidoirie qui restera sans doute dans les annales, a donné un cours de droit aux parties civiles qui s’appuient sur la méthode coué pour affirmer que le boycott est illégal en France, mélangeant pommes et poires, produits et personnes, droit de la presse et droit économique.... Eh bien, c’est faux, a-t-il démontré, le boycott pour des raisons politiques et morales n’est pas illégal. Et la France devient la risée de toute l’Europe en appelant à la condamnation des femmes et des hommes qui appellent à boycotter Israël, et uniquement Israël. Tout comme la chancellerie se ridiculise en entamant des poursuites uniquement contre Olivia Zémor, alors qu’une dizaine d’autres organisations ont participé à l’action incriminée, l’ont revendiquée, et l’ont publiée sur de nombreux sites.
Il s’était au préalable indigné de la rédaction de la citation à comparaître par cette même chancellerie, qui accusait la présidente de CAPJPO-EuroPalestine du délit de discrimination envers des personnes, alors même que le ministère public se permettait une expression racialiste dans l’énoncé de l’accusation, en visant notamment "une femme de type nord-africain" pour ses propos dans la vidéo d’Evry.
Enfin, l’accusée elle-même, guère impressionnée par les calomnies et le terrorisme moral des Goldnadel et autres Markowicz, a contribué a retourner la situation, en faisant de ce procès, non pas celui du boycott d’Israël, mais bien celui de l’Etat d’Israël et de l’Etat français pour sa collaboration avec des criminels de guerre.
CAPJPO-EuroPalestine
http://www.europalestine.com/spip.php?article6246

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