Tribunal Russel pour la Palestine
Au cours de deux jours d’intenses travaux où se sont succédés à la barre pas moins de 25 experts et témoins, le Tribunal Russell sur la Palestine (TRP) a examiné la question suivante : « Les pratiques d’Israël envers le Peuple palestinien violent-elles l’interdiction internationale de l’apartheid ? ».
Le crime d’apartheid
Le Jury, composé de personnalités internationales connues pour leur intégrité morale, appuyé par des experts juristes spécialisés en droit international, a conclu à l’existence d’un régime institutionnalisé de domination qualifié d’apartheid selon les critères définis par le droit international.
Ce régime discriminatoire prend des formes et des intensités différentes selon les lieux où vivent les Palestiniens. Les Palestiniens, soumis à la réglementation militaire coloniale dans les territoires, sont sujets à une forme aggravée d’apartheid. Les Palestiniens citoyens d’Israël, bien que disposant du droit de vote, ne font pas partie de la nation juive telle que définie par la loi israélienne, ils sont donc exclus des bénéfices de la nationalité juive et sont sujets à une discrimination systématique par la violation de leurs droits fondamentaux. Le Jury a conclu que les Palestiniens quel que soit l’endroit où ils résident sont soumis collectivement au même apartheid.
L’État d’Israël est tenu à respecter l’interdiction du crime d’apartheid tel que le prévoit le droit international. La définition légale du crime d’apartheid comporte trois éléments :
• deux groupes raciaux distincts peuvent être identifiés ;
• des "actes inhumains" sont commis à l’encontre du groupe dominé ;
• de tels actes sont commis systématiquement dans le cadre d’un régime institutionnalisé de domination d’un groupe sur l’autre.
La notion de « groupe racial » est davantage définie comme sociologique que comme biologique.
La notion d’actes inhumains comprend : les assassinats à large échelle ou ciblés lors des incursions militaires ; la torture et les traitements dégradants de prisonniers ; la privation systématique des droits humains empêchant les Palestiniens, y compris les réfugiés, d’exercer leurs droits politiques, économiques, sociaux et culturels. Il en résulte une fragmentation territoriale et la création de réserves et d’enclaves qui séparent Palestiniens et Israéliens. Une politique décrite par l’État d’Israël lui-même comme « Hafrada » ce qui signifie en hébreu séparation.
La notion de régime systématique et institutionnalisé renvoie à des législations différentes pour les Palestiniens et les Israéliens.
La persécution comme crime contre l’Humanité
La notion de persécution est définie comme une privation intentionnelle et grave des droits fondamentaux des membres d’un groupe identifiable dans le cadre d’attaques larges et systématiques contre des populations civiles. Notamment : le blocus de Gaza comme châtiment collectif, l’attaque de civils lors d’opérations militaires, la destruction de maisons non justifiée par des nécessités militaires et l’impact du Mur sur les populations et la démolition des villages bédouins.
Les conséquences juridiques
En commettant des actes d’apartheid et de persécution, Israël engage sa responsabilité internationale, doit mettre fin à ces agissements criminels et doit réparer complètement les dommages causés par ceux-ci. Les États et les organisations ont aussi la responsabilité d’agir afin de pousser Israël à arrêter ces actes d’apartheid et de persécution. Ils doivent aussi s’abstenir de porter aide et assistance à Israël et mettre en œuvre des poursuites judiciaires à l’encontre de cet État.
Recommandations
– Le TRP demande instamment à l’État d’Israël de démanteler immédiatement son système d’apartheid, de mettre fin aux lois et pratiques discriminatoires et d’arrêter la persécution des Palestiniens ;
– Tous les États doivent coopérer en vue de mettre fin à cette situation illégale ;
– Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) doit accepter la plainte déposée par l’Autorité palestinienne et lancer une enquête sur les crimes internationaux susmentionnés ;
– La Palestine doit être acceptée comme Partie au Statut de Rome de la CPI ;
– La société civile doit recréer l’esprit de solidarité qui a contribué à la fin du fin du régime d’apartheid en Afrique du Sud notamment par le moyen de la campagne Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS) ;
– L’Assemblée générale des Nations Unies doit recréer un comité spécial des Nations Unies contre l’apartheid concernant le peuple palestinien ;
– L’Assemblée générale des Nations Unies doit demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice afin d’étudier la nature de l’occupation prolongée des territoires palestiniens et la politique d’apartheid ;
– Le Comité des Nations Unies pour l’élimination des discriminations raciales doit inclure la question de l’apartheid dans sa prochaine analyse du cas israélien ;
– Le gouvernement sud-africain, comme hôte du TRP doit s’assurer qu’aucune forme de représailles ne soit exercée par l’État d’Israël contre les témoins présents lors des travaux du TRP.
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