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jeudi 28 février 2013

Ha! démagogie , que fait-tu comme émule! la nouvelle présidence de la Chambre d'agriculture n'y fait pas exception , bien au contraire

 Ainsi donc , je suis devenu le bouc émissaire de sa seigneurie Bonnin nouveau pape de l'agriculture productiviste de l'Allier , après avoir été la vedette de son discours corporatif d'investiture le voilà qui en remet un couche sur "La Montagne "de ce jour .
 Il y fait référence au reportage sur la traçabilité de la viande bovine par les fameuses boucles "d'oreille" qui tombent comme les feuilles en automne , et qui dans la filière peuvent se balader fâcheusement , de plus la viande en carcasse perd la traçabilité si elle est mal gérée  , elle est tributaire de la bonne volonté humaine ...
et c'est là que tout devient aléatoire .
Il faut éviter tout risque à certains de se faire du fric sur notre image ; car c'est bien la effectivement qu'il faut tout brider . Car n'oublions pas que dans cette crise dite sanitaire nous avons eu  la chance qu'elle soit  révélée par de la viande de cheval  .
   Tout cela aurait être tellement plus grave  ; n'oublions pas que nous sommes en pleine mondialisation  financière et libérale , les USA ont envie (et c'est peu dire ) d'inonder le marché de leur viande plutôt shootée ; et comment la retrouver ? 
 Alors face à tous ces défis  ,en sachant qu'à chaque crise il y a deux types de populations qui sont victimes, en l’occurrence les éleveurs et les consommateurs , nous nous sommes interrogés sur la meilleure manière de régler -ou tenter de le faire- et c'était d'employer le marquage ADN , simple, une bague ,sorte d'emporte pièce en se mettant en place recueille des tissus (poils , cartilage et peau) dans une capsule sertie et étanche , qui porte le même numéro   que la partie restée dans l'oreille . ainsi à tout moment un prélèvement  après la sortie de l'exploitation peut être effectuée  et suivre tout le trajet  de la bête ou de sa viande . 
 Ainsi nous pouvons couper l'herbe sous le pied à tout trafic , à toute fraude ,  à toute spéculation  ;de plus nous sommes sûrs , nous éleveurs que nos produits soient retrouvés jusque sur l'étale ....
  Alors pourquoi , s'en prendre à ceux qui dénoncent et proposent ? Trois solution , soit monsieur sa majesté président n'est pas sûr de lui .. soit des intérêts sont à protégés à tout prix ..soit le dogme corporatiste est trop fort et ne peut rien entendre d'autre que l'idée maîtresse du lobby de la filière viande ... 
  En attendant j'ai eu droit aux honneurs de son discours , de son intervention dans le journal "La Montagne"  ,et au final son objectif est simple  faire en sorte de détourner l'attention sur moi qui dénonce  et protéger la filière ,  si possible attaquer le pouvoir politique , car cet extrémiste peut faire feux de tout bois pour faire avancer ses idées néolibérales .
  Ce qui m'a choqué ce n'est pas tant ses colères , elles sont aussi légendaires que grotesques mais c'est cette façon mensongère d'interpréter des déclarations pour servir sa cause personnelle , vraiment je plains de tout mon coeur  les salariés de cet organisme , eux qui devront le supporter pendant 6 années , que ressemblera notre département et que restera t'il des paysans au bout de tant d'années..

Je reproduis ci dessous l'article qui parle de cette traçabilité sur le site du Fin Gras du Mézenc, eux on prit cette option lorsque nous l'avions proposée en 2000 pour l'Allier , que de temps perdu...:
 http://www.aoc-fin-gras-du-mezenc.com/Tracabilite-et-controles.29.0.html


Une traçabilité optimale
Boucle opérant un micro-prélèvement de cartilage d'oreille
Alors que depuis les crises sanitaires à répétition des dix dernières années la réglementation générale semble avoir poussé jusqu’au bout la traçabilité en matière de viande bovine, l’association Fin Gras du Mézenc applique une méthode à la pointe du progrès lui permettant de suivre les animaux jusque dans l’assiette du consommateur.
Depuis 2001, l’association Fin Gras utilise une technique très spécifique d’identification des animaux Fin Gras du Mézenc qui consiste à apposer à l’oreille des bovins (en vif dans les étables) une boucle qui opère un micro-prélèvement du cartilage d’oreille.
Elle permet alors d’assurer une traçabilité parfaite des animaux et surtout de la viande qui en est issue. En effet, par comparaison de l’ADN, un prélèvement de viande à n’importe quel stade de la commercialisation permet à l’association Fin Gras du Mézenc de disposer d’un moyen de vérification du parcours de chaque bête de l’étable à l’étal et garantit ainsi une traçabilité irréprochable de la viande AOC.
Que ce soit dans les abattoirs, chez les bouchers ou restaurateurs, et même jusque dans l’assiette, ou autrement dit, tant que la viande n’a pas subit de cuisson (qui dénature l’ADN), un contrôle est réalisable par simple prélèvement de viande.
L’analyse par un laboratoire de biologie moléculaire des échantillons d’oreille et de viande permet alors de les comparer et de vérifier la conformité de l’affichage, notamment en ce qui concerne la provenance de l’animal.

mercredi 27 février 2013

Lors des élections à la Chambre d'agriculture , le président de la FNSEA 03 n'a pas apprécié de ne pas avoir gagné le collège syndical , finalement j'ai décidé de lui répondre , non pour moi mais pour la FDSEA de l'Allier


En réponse à votre édito , monsieur Ferrand ...
La victoire des libéraux n'est pas complète
«  Malheureusement nous ne pourrons pas faire le grand chelem avec le collège syndical, puisque malgré l’énergie que j’ai dépensée pour arriver à unir tous les agriculteurs autour de la FNSEA03 et des JA03, le mode d’élection et les mensonges de la FDSEA03 me volent cette ultime victoire au profit de Jean-Claude Depoil en cela aidé par une incompétence notoire des services de la préfecture incapables de respecter les dates et textes faisant loi. » 
C'est ainsi que Monsieur Ferrand fait part de son désappointement...
Dans un premier temps je n'avais pas envie de relever cette réaction un peu bizarre puis après je me suis dit , quand faut y aller faut y aller …
Avant de vous interpeller Monsieur , il est bon de refaire un peu l'historique de tout cela .
Dans un premier temps donc , l'inscription aux listes électorales de ce collège a eu quelques ratées , et oui nous avons oublié de réinscrire la FDSEA – il n'y a que ceux qui ne font rien qui n'oublie rien et encore – par contre « L'UDSEA »et les JA n'ont pas fait mieux puisque seuls les deux présidents étaient inscrit , ( voyez le truc il n'y aurait eu que deux votants !) bref en réunion de la commission ou Bruno Vif y assistait et comme il y avait carence de votants et de candidats forcément! , il a été décidé à l'unanimité de repousser les délais afin que tous le monde se mette en ligne .
Tous le monde fait son boulot et 3 jours avant la fin de toutes contestations , je reçois un courrier du tribunal d'instance ou je me vois assigné par « l'UDSEA » à comparaitre avec Bruno Vif et … la Préfecture
Une audience surréaliste ou elle reproche à la préfecture son comportement et bien sur, lui fait porter la responsabilité de toutes ces ratées , que l'ensemble de la commission avait adopté dont les représentants de la FNSEA et nous apprenons que l'UDSEA n'est pas dissoute et que son président reste Monsieur Ferrand et par la voix de son avocat cette organisation fantôme nous reproche notre représentativité , rien que çà , le 9 janvier cette « UDSEA » était déboutée et condamnée aux dépend ….

C'est ce que ce monsieur doit appeler  « les mensonges de la FDSEA et l'incompétence notoire des services préfectoraux ».......

Alors monsieur Ferrand , je m'excuse de vous importuner mais voyez vous , je n'ai pas eu le sentiment de vous voler « votre victoire », je me suis plié comme mes camarades , aux résultats des urnes .
Je ne voudrais pas me sentir envahissant mais la FDSEA est l'héritière d'un siècle de syndicalisme dans l'Allier , c'est en 1904 qu'elle est née à Bourbon l'Archambaud ,avec Michel Bernard , et Emile Guillaumin , déjà à l'époque vos amis n'étaient pas tendre avec eux , les porteurs de votre drapeau politique avaient fait en sorte que Michel Bernard ne puisse plus vendre ses produits sur le marché , ce sont ses voisins qui le faisaient à sa place ! Et oui ,déjà les pressions faisaient parties de l'attirail , puis vint la première guerre mondiale et son cortège de malheur , mon grand père la fit , le vôtre aussi peut être , quand le mien revint ,son père était métayer et fut expulsé par un régisseur mon grand père lui ayant « mal répondu ») ,vous connaissez très bien « le métier de régisseur»...
Le syndicalisme perdura jusqu'à la deuxième guerre mondiale ou les responsables syndicaux entrèrent pour la plupart en clandestinité ; après plus de quatre années de souffrances pendant que certains firent merveilles auprès d'un certain Maréchal en s'engraissant du marché noir ….
Le syndicalisme renaissait et par l'intermédiaire de la section des fermiers et métayers, la FDSEA actuelle voyait le jour, ils furent nombreux à tout donner pour elle , l'un des nôtres Emile Merle regagna sa dernière demeure le jour du dépouillement du vote du collège des organisations syndicales , Georges Mercier y laissa la vie , Henri Friaud y laissa la santé grâce à un certains Bonnefille qui était son Secrétaire Général , puis Henri Savel ,lui, mourut au travail ….
Vos amis ont eu ,même peut être vous aussi , la délicatesse de débaptiser la salle Georges Mercier , sans être méchant monsieur , imaginez que monsieur Lesage ,-heureusement ce n'est pas le cas - nous ai quitté le temps de son mandat je suis sûr que vous auriez eu à cœur de lui laisser une salle à la postérité , vous , vous voulez effacer l'œuvre de George Mercier , toute trace de lui , il est vrai qu'un homme progressiste ne pouvait mériter votre estime ..
Voyez vous monsieur , nous ne vivons pas le syndicalisme de la même manière , chez nous l'engagement y est total , non pas en vue de telle ou telle carrière ou visant tel ou tel poste , non l'objectif est de se rendre utile à une cause , pour nous c'est celle des paysans , de ceux qui souffrent ,de ceux qui n'ont pas droit à la parole , et -ou - pour qui c'est tellement difficile de donner son avis .
Oui Monsieur, vous vous fabriquez des structures au fils des besoins de vos objectifs de carrière .. Sinon comment expliquer encore l'existence de cette UDSEA alors que chacun sait bien qu'elle est « morte » en mai 2010 au moment de la création de votre FNSEA03 d'ailleurs votre avocat a fini par avouer que si vous n'aviez pas garder cette «  structure » vous ne pouviez pas présenter de liste ..avouez que vous avez une drôle de conception du syndicalisme si pour nous les élections à la chambre ne sont qu'un épisode de la lutte syndicale , pour vous cela semble en être une finalité …
Quelle différence entre nous ! n'est ce pas ?
Vous êtes ce qu'on peut appeler un agriculteur « compétent » « rentable » « compétitif » de ces managers qu'adorent les banques et les décideurs , quelque part vous en êtes un de décideur de ces gens qui engagent un territoire dans une politique individualiste compétitive qui considère le produit brut sans compter les répercutions sur l'environnement , le prix humain à payer , en fait , vous êtes un grand homme pour le régime dans lequel on vit
Que suis je donc à côté de vous , pas grand chose , moi qui ai toujours mieux aimer les voisins que les hectares , mieux aimer la vie que l'argent , mieux aimer l'être humain que la finance , les banques vous savez ce n'est pas ma tasse de thé ,mais ne vous inquiétez pas c'est réciproque .
Vous savez vous présenter , vous savez vous tenir en société , regardez vous ; vous ressemblez quelque chose on a même du mal à vous considérer comme paysan , non , pardon comme un agriculteur , un chef d'entreprise finalement , on penserait en vous voyant à un patron de PME , vous imposez le respect .
Moi monsieur , comme tous mes copains de la FDSEA on a plus souvent des sabots plein de patouille que les souliers vernis , vous me direz heureusement que nous ne sommes pas tous pareil , je sais ,je suis toujours mal fagoté et dites très bien que je suis un homme du passé , rétrograde , non compétitif , et non performant .Oui je le confesse je ne cours pas après la production pour la production , plutôt , j'aime quand je vois une bête heureuse , dans ma vie j'ai souvent eu le manche , j'ai souvent eu des tracteurs pas très beaux plutôt anciens , c'est vrai je n'essaie pas de paraître , je n'ai pas envie , je suis ce que je suis , j'ai horreur des cravates , horreur des costumes , je suis bien avec des gens comme moi , qui parlent le même langage que moi , tout au long cette vie donnée au syndicat je n'ai rien recherché pour moi , jamais une position publique n'était dictée par un besoin personnel non , jamais .
La FDSEA , tout son conseil est ainsi fait , nous pensons déjà au bien commun avant de penser à nous , si ce n'était pas le cas voilà longtemps que nous aurions fermé les portes , et fait partie de vos courtisans .Quand cela va mal nous pensons à ceux qui , pendant l'occupation fournissaient leur pré ,leur terre , pour recevoir les parachutages ou leur granges pour cacher le contenu de ces avions venus de Londres c'était autrement plus dangereux que de subir les pressions de cette Nomenclatura professionnelle , dont vous participez à actionner les leviers , mais peut être après tout ne le savez vous pas ....
Les responsables syndicaux de la FDSEA , qu'ils soient départementaux ,cantonaux ou locaux ne font pas que de gérer une structure , ils la vivent , « ils font corps avec elle »pour tous , la « Fédé »est la raison d'être .
Je sais que vous ne pouvez pas comprendre cela , comment le pourriez vous , votre vie est ailleurs , vous avez une carrière à sauver, vous êtes administrateur à Limagrain , votre croisade pour la reconnaissance de OGM est connue , -j'ai eu à débattre avec vous – vous en êtes un fervent défenseur , votre famille est impliquée dans la gestion du foncier . Dans votre « édito » vous annoncez la couleur en disant que les prochaines batailles seront aux tribunaux des baux ruraux , effectivement vous avez raison , car vous ne pouvez pas supporter des assesseur issus de la section des fermiers et métayer qui est née juste à la libération et qui viscéralement jusqu'à maintenant a défendu bec et ongles ce statut du fermage dont beaucoup de vos amis disent de lui qu'il est un frein à l'installation des jeunes .
En effet , ce statut du fermage a permis un développement sans précédent de l'agriculture à partir du moment ou les fermiers avaient la sécurité de l'emploi .Vous comprenez et admirez mieux madame Parisot qui affirme qu'un assouplissement des licenciements faciliteraient l'embauche. Heureusement le législateur n'a pas encore pris ce chemin pour ce qui concerne le statut du fermage mais la tentation est grande chez vous et vos amis de l'assouplir « afin de permettre aux propriétaires de s'engager dans une politique d'installation » sic!

Les résultats de ces élections sont ce qu'ils sont - je pense que la FNSEA nationale ne tardera  à vous récompenser de vos bons et loyaux services - nous ne remportons pas le collège des chefs d'exploitation ,pas plus que les retraités mais nous gardons notre tissus local ,c'est ainsi , nous ne voulons pas tenir le langage qui fait plaisir , comme celui de dire « plus vous serez gros plus vous serez considérez » , non , non monsieur « seul les poissons morts suivent le courant » .
Hélas l'histoire NOUS donnera raison , je dis hélas car la politique que vous prônez se paiera au prix fort , très cher tant au point de vue territorial , environnemental , humain , les déserts ne nourriront plus les hommes .
Je voudrais vous citer Géronimo ce chef indien dont le peuple fut décimer par l'armée américaine :
« Quand le dernier arbre aura été abattu,
Quand la dernière rivière aura été empoisonnée,
Quand le dernier poisson aura été péché,
Alors, on saura que l’argent ne se mange pas. »
Nous n'avons pas votre intelligence mais terminons par un autre avertissement d'un homme politique d'outre-Atlantique : Henry ford
« Si la population comprenait le système bancaire, je crois qu’il y aurait une révolution avant demain matin ».

Je ne veux pas abuser de votre temps et je me doute bien que je vous ennuie avec mes radotages .
Un petit mot tout de même sur la presse agricole : ne trouvez vous pas , vous le rassembleur  ,

injuste,  que le Bourbonnais Rural ne bénéficie pas des mêmes traitements (financiers)que l'Allier Agricole car maintenant vous ne pouvez plus dire du « BR » que c'est un journal « partisan » puisque vous vous exprimez en tant que responsable syndical dans l'Allier Agricole et y avez vous aussi mené votre campagne électorale , alors les deux journaux , il me semble , devraient être traités de la même manière par l'Agent Comptable de la Chambre d'Agriculture qui est une institution semi publique , a moins qu'il faille développer des idées ultra libérales pour décrocher un « financement ».
Je termine , je vous libère enfin ,sachez que ce n'est pas Jean Claude Depoil ni Sandrine Mézière qui ont été élu au collège des organisations syndicales , mais les représentants de la FDSEA héritière de toute cette histoire riche d'expériences humaines , et porteuse d'une vision humaniste du devenir paysan , gardez bien à l'esprit cela .
La FDSEA restera encore longtemps porteuse d'espérance et ses élus porte-paroles de ceux qui ne veulent pas mourir sur l'autel de l'ultra libéralisme dont vous brandissez les couleurs .

Jean claude Depoil
Secrétaire Général FDSEA

dimanche 24 février 2013

Frédéric Lordon , analyse la loi sur les banques : le minotaure au pistolet à bouchon — inutile de rentrer les enfants, on ne prévoit pas de bain de sang.!



Ce sera sans doute la perle de la crise. Karine Berger, députée socialiste, rapporteure du projet de loi dit de « séparation » et de « régulation » des activités bancaires, reprenant la parole en commission des finances après les exposés de MM. Chifflet, Oudéa et Bonnafé, respectivement président de la Fédération bancaire française, président de la Société Générale et directeur-général de BNP-Paribas : « Vos trois exposés laissent paraître que vous n’êtes pas réellement gênés par ce projet de loi ; j’en suis à la fois étonnée et ravie » [1]…
Qu’elle en fût uniquement étonnée n’aurait trahi qu’une charmante simplicité d’esprit. Qu’elle en soit au surplus ravie ne laisse plus le moindre doute quant au côté où elle se tient. Pour notre part, plus rien ne nous étonne dans les rapports du socialisme de gouvernement et de la finance — quant au ravissement, évidemment… « I am not dangerous », s’était empressé de préciser François Hollande à l’adresse de la City qu’il était venu rassurer après l’avoir nommée « l’ennemi sans visage », sans doute dans un moment d’égarement, caractéristique du contact avec la foule des meetings. Heureusement vite rattrapé. La députée Berger et le ministre de l’économie et des finances Moscovici, eux aussi, poursuivent le minotaure au pistolet à bouchon — inutile de rentrer les enfants, on ne prévoit pas de bain de sang.
Ce sera donc du gâteau pour les historiens d’ici quelques décennies de se livrer à l’analyse comparée des réactions respectives à la crise financière des années trente et à celle de 2007, et l’on saura à quoi s’en tenir quant à la tenue des élites des deux époques, leur degré de compromission avec les forces de la finance et de servilité vis-à-vis des puissances d’argent. « La solution du rapport Liikanen est certes trop radicale… », déclare sur le ton de l’évidence Karine Berger, à propos d’une de ses dispositions (relative au traitement des opérations dites de « tenue de marché »). « Certes ». Fouetter les banquiers avec le plumeau du rapport de la Commission européenne, c’est en effet d’une insoutenable violence. Ne connaissant pas à Karine Berger de lien financier crasseux avec les institutions bancaires — à la manière de certains économistes en Cercle — nous savons donc maintenant qu’on peut être vendu(e) à la finance sans en toucher le moindre sou [2] ! Ce qui est peut-être pire encore… Un article de Benjamin Masse-Stamberger sur l’art et la manière du lobbying bancaire de vider un projet de régulation de toute substance [3], nous apprend (entre autres) que la vice-présidente (socialiste) de la commission des finances, Valérie Rabault, est l’ancienne responsable Risk Strategy des activités dérivés-actions de BNP-Paribas. « Loi de régulation bancaire », « commission des finances », « vice-présidente socialiste », « BNP-Paribas dérivés-actions » : inutile de jouer à « cherchez l’intrus » dans cette liste, dans le monde où nous sommes, il n’y en a plus. Bien sûr, dans un geste altier et pour ne pas donner prise à l’accusation de « conflit d’intérêt », Valérie Rabault, vice-présidente (socialiste) de la commission dérivés-actions de l’Assemblée nationale, a décliné d’être rapporteure du texte de loi. Il faut bien admettre que le cran juste au-dessus aurait consisté à faire rédiger le texte directement par Michel Pébereau, et ça aurait fini par se voir.
Mais au fond de quoi s’agit-il ? Trois fois rien : la race des seigneurs de la finance globalisée a perdu aux alentours de 2 000 milliards de dollars dans l’une des crises les plus retentissantes de l’histoire du capitalisme ; les banques françaises, pas feignantes, ont tenu à figurer dignement et à prendre toute leur part du bouillon. Car, pour toutes ses fanfaronnades, le système bancaire français aurait purement et simplement disparu sans les concours massifs de la Banque centrale européenne (BCE) et les aides d’Etat apportées par véhicules ad hoc interposés [4]. Sans doute les montants mobilisés en France sont-ils moindres qu’aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni — il a fallu tout de même que ces véhicules lèvent 97 milliards d’euros [5] pour nos chères banques. Les banquiers se croient dégagés de tout arriéré au motif qu’ils ont remboursé les aides d’Etat. On leur rappellera donc d’abord que les contribuables français et belges plongent — pour l’heure — de 12 milliards pour le compte de Dexia. On leur rappellera surtout que le remboursement en question ne les exonère de rien du tout, et notamment pas de l’effondrement de croissance qu’ils ont laissé derrière eux, où nous sommes encore pour un moment, avec les dizaines de milliers de chômeurs supplémentaires qui vont avec.
Dans Le Monde diplomatique de février, en kiosques : « Notre solution pour l’Europe », d’Alexis Tsipras et « Comment contourner l’impôt sans s’exiler » d’Alexis Spire. Il était question d’historiens à l’instant, gageons qu’un de leurs motifs d’ébahissement tiendra à l’extravagante indulgence dont le groupe social de la finance aura pu jouir relativement à l’ampleur de son pouvoir de destruction avéré. Car cinq ans après le désastre : rien ! — et la « loi de séparation et de régulation bancaire » est à peine mieux que rien. L’idée de départ était pourtant simple : les marchés sont intrinsèquement instables, les activités de marché sont donc intrinsèquement déstabilisantes. Pas seulement pour elles-mêmes mais pour l’économie tout entière quand l’accident franchit des seuils critiques. Par conséquent, de deux choses l’une : ou bien l’on en prend son parti et l’on s’habitue par avance à devoir régulièrement repasser par des épisodes semblables, avec récession et mobilisation du corps social tout entier pour sauver la finance ; ou bien on choisit d’y mettre un terme, c’est-à-dire de cantonner la nuisance au cordon sanitaire. Dans un mélange de candeur et de parfaite sûreté de soi, Frédéric Oudéa, le patron de la Société générale, en effet « pas gêné » (au sens de Karine Berger), a cependant fini par lâcher le morceau en avouant que la loi de « séparation » n’allait le séparer que de 1,5 % du total de ses activités…
Pour avoir, donc, quelque chose qui ne soit pas rien, il aurait fallu au texte de loi, en dépit de toutes ses dénégations, ne pas se laisser complètement intoxiquer par les jérémiades de l’industrie financière qui jure que chacune de ses opérations, même des plus scabreuses, est une « contribution au financement de l’économie ». Mais les esprits socialistes ont été dévastés par l’idée que le financement par le marché est d’une incontestable modernité — « et donc » toutes les activités connexes qui vont avec : couverture, fourniture de liquidité, financement du shadow banking system etc. Reste 1,5 %.

Tout au marché

« Quand certaines entreprises comme Vinci, ont besoin, pour financer des projets à dix ou quinze ans, de plusieurs centaines de millions d’euros, elles se tournent non pas vers des banques commerciales mais vers des banques d’affaire, qui pratiquent là des activités de marché non pas spéculatives mais utiles à l’économie concrète », proteste Karine Berger pour rejeter un amendement qui demandait plus que la simple filialisation des activités de marché. Mais rien n’établit que le coût total du financement obligataire soit beaucoup plus compétitif que celui d’un crédit bancaire classique. En revanche, on sait avec quelle brutalité une entreprise en difficulté peut se voir refuser tout accès aux marchés — ironie du sort, elle n’a plus alors qu’à trouver une banque secourable qui acceptera de lui sauver la mise avec du bon vieux crédit à la papa. Les banquiers français glapissent que, empêchés de conduire ces opérations de marché, ils perdraient clients, chiffre d’affaire et profit. S’agissant de leur chiffre d’affaire, de leur place dans la hiérarchie mondiale des plus grandes banques, et de leur profit, la collectivité doit d’emblée affirmer clairement qu’elle s’en fout ! Le corps social n’a aucun intérêt à jouer au jeu infantile de la plus grosse qui passionne les capitalistes (plus encore les financiers), il aurait même l’intérêt exactement contraire. Il s’en aperçoit désagréablement au moment de ramasser les morceaux en prenant conscience qu’un secteur bancaire qui pèse (en actif total) jusqu’à quatre fois le produit intérieur brut (PIB), comme c’est le cas en France, lui laisse entrevoir l’ampleur possible de la facture — et que la « grosse » lui laisse le fondement un peu douloureux.
Que les banques ne soient pas trop grandes, mais ternes et sans attrait, qu’elles fassent des profits modestes qui ne leur donnent pas le délire des grandeurs et n’engraissent pas les actionnaires (ou les traders), c’est exactement l’objectif à poursuivre. Quant à leurs grands clients, ces derniers comprendront assez vite que, supposé un coût supérieur du crédit bancaire (par rapport au financement de marché), celui-ci paiera bien la continuité d’une relation partenariale qui ne les abandonnera pas au premier tournant — là où les marchés les éjecteraient à la moindre difficulté sérieuse. Il y a donc peu de chance pour que Vinci ne confie plus ses destinées qu’à Goldman Sachs.
Mais la manie des marchés qui habite les socialistes français va maintenant jusqu’à souhaiter d’y plonger les petites et moyennes entreprises (PME). On sait assez que les relations de ces dernières avec les banques ne sont pas une allée semée de pétales de rose… Mais l’idée de les rendre modernes en les envoyant se faire voir au marché est une trouvaille où l’ineptie le dispute à l’entêtement idéologique. Car de deux choses l’une : ou bien seule la crème des PME y aura accès et alors, par construction, la chose demeurera marginale ; ou bien l’on y envoie gaiement le gros de la troupe, soit des milliers d’entreprises, et l’on se demande bien comment les analystes financiers ou les agences de notation pourront avoir quelque suivi sérieux d’un nombre aussi élevé de débiteurs, là où les réseaux d’agences bancaires, au contraire, ont une connaissance locale et fine de leurs clients — attendons-nous donc aux ratings à la louche façon subprime.

« Les activités de marché : comme le cochon (tout est bon) »

Bien sûr l’élite bancaire ne se reconnaît pas entièrement dans la métaphore charcutière, mais c’est quand même un peu l’idée. Ou plutôt le sophisme : si la forme supérieure du financement de l’économie est à trouver dans le marché, alors tout ce qui contribue à la belle activité du marché est peu ou prou désirable. Sous une forme un peu plus sophistiquée, l’argument se décline le plus souvent sous la thèse increvable de la liquidité : pour que des agents de l’économie réelle émettent avec succès des titres sur les marchés, il faut qu’ils trouvent preneurs, et pour que les preneurs acceptent de souscrire, il faut qu’ils soient certains de ne pas rester « collés » et de pouvoir sortir à tout instant du marché. Il importe alors que le segment de marché considéré connaisse une activité permanente suffisante pour que chaque vendeur soit assuré de trouver acheteur (et réciproquement). La liquidité, voilà donc la justification ultime de la spéculation qui en finirait presque par se présenter comme un service public : foin des appâts du profit — du tout, du tout — les spéculateurs, certes en première instance, étrangers à l’économie réelle, n’en sont pas moins ses fidèles desservants puisqu’ils s’offrent à être contreparties pour tous les autres agents qui ont besoin d’entrer ou sortir du marché, assurant finalement qu’il tourne bien rond, donc permettant qu’il finance efficacement… les agents de l’économie réelle, quod est demonstrandum.
Dire « spéculateur » est par conséquent inutilement blessant : préférer « teneur de marché ». Certes la « tenue de marché » révèle de fortes accointances avec la recette du pâté d’alouette car — étonnamment — on observe en général dix fois plus d’opérations spéculatives que d’opérations à finalité « réelle » — pour sûr le marché est bien tenu… La plus charitable des interprétations conclurait que le « service public de la liquidité » est fâcheusement entropique — et en fait, pur prétexte à la pollution spéculative. La liquidité serait aussi bien assurée avec… neuf fois moins d’opérations de « teneur de marché », et encore par beau temps seulement. Car, en cas de coup de tabac, les « teneurs », pas fous, font comme tout le monde : ils fuient le marché à tire-d’aile, laissant la liquidité s’effondrer, au moment où on en aurait le plus besoin.
Ce sont pourtant ces opérations de teneur de marché que la loi de « séparation » tient beaucoup à ne pas séparer — à l’inverse de la Commission européenne (rapport Liikanen), qui cède visiblement à tous les vents mauvais du populisme. Evidemment n’importe quelle opération spéculative pour compte propre peut, sur simple demande, être requalifiée de « tenue de marché » — c’est bien pratique. En résumé, tout et n’importe quoi sur les marchés est tenue de marché : toute offre puisqu’elle permet à un acheteur d’acheter, et toute demande puisqu’elle permet à un vendeur de vendre… Il suffisait d’y penser ! Puisque n’importe quoi contribue à tenir le marché et que le marché est ce-qu’il-nous-faut-pour-financer-l’économie, il faudrait être idiot, inconscient ou de mauvaise foi pour séparer quoi que ce soit — puisquetout sert. La commission des finances française s’est rendue sans hésitation à cet argument de simple bon sens — moyennant quoi, en effet, 1,5 % et Oudéa pas gêné.

Ne pas rompre avec nos amis les « hedge funds »

C’est une direction tout à fait semblable, et en fait identiquement argumentée, que prend le texte de loi en matière de relation des banques avec les hedge funds. Fléaux avérés, les hedge funds, dont c’est constitutivement le principe que de prendre des positions risquées et très leviérisées, devraient être isolés dans l’équivalent financier de léproseries, et en tous cas interdits de toute relation avec le système bancaire — après tout, que les héros du marché se débrouillent pour trouver leur financement sur les marchés. Mais, se dit le ministre Moscovici, les hedge funds sont des éléments de ce shadow banking system, dont nous savons qu’il détient maintenant quelque 20 % du total des actifs financiers — interprétés, toujours par le même contresens, comme « 20 % des contributions au financement de l’économie » —, c’est donc très important — parce que très utile à l’économie. La conclusion s’ensuit comme déroulé de papier à musique : il ne faut surtout pas empêcher les banques de financer les hedge funds qui financent l’économie. Bravo ministre ! Une objection élémentaire lui signalerait pourtant que les banques pourraient financer directementl’économie au lieu de passer par la case hedge funds… qui en fait Dieu sait quoi. L’objection pourrait d’ailleurs être généralisée à tout le shadow banking system, ce trou noir agglomérant les entités financières les plus obscures et les moins régulées, et qui a pris cette importance uniquement parce que le crédit bancaire s’est laissé évincer au nom de la modernité. Que les banques universelles cessent de financer par crédit ce système de l’ombre, et ce serait simultanément le meilleur moyen d’en piloter l’attrition relative, et pour elles-mêmes de se protéger de la vérole que ce système ne cesse de répandre — rappelons que la catastrophe Bear Stearns commence avec la fermeture de ses deux hedges funds les plus « sophistiqués », que BNP-Paribas avait dû fermer inopinément trois des siens à l’été 2007, et que la grosse catastrophe tourne vraiment au vilain avec la fermeture des money market funds à l’automne 2008. Personne ne pourra soutenir qu’un financement sain des entreprises et des ménages ne pourrait être pris en charge par le simple crédit bancaire et ne pourrait être assuré que par ces entités.
Mais non ! Les banques universelles pourront continuer de prêter aux hedge funds et d’exposer à leur risque les dépôts du public. « Nous avons pris toutes les précautions », se défendent les promoteurs du texte, voyez seulement l’alinéa 10 de l’article premier : les banques ne pourront avoir d’exposition non sécurisée vis-à-vis des fonds à effet de levier. Et puisque ne seront autorisées que les transactions« sécurisées », n’est-ce pas que la sécurité règnera ? Mais en quoi ces sécurisations consistent-elles au juste ? En cette pratique extrêmement commune de la finance spéculative dite de la « collatéralisation » : une entité emprunte auprès d’une autre en déposant en gage un actif d’une valeur équivalente à celle du prêt contracté. Or rien n’est sûr dans cette affaire ! On notera pour commencer que toutes les opérations de prêt à des hedge funds sont déjà collatéralisées (« sécurisées » au sens Moscovici-Berger) — c’est simplement l’actuelle pratique ordinaire en cette matière ! Et l’on comprendra alors que le texte de loi ne produit rigoureusement aucun changement, donc aucune restriction sous ce rapport.

Les illusions « collatérales »

Mais surtout les actifs apportés en collatéral peuvent voir leur valeur s’effondrer, précisément à l’occasion d’une crise — les collatéraux sont supposément des papiers de « très bonne qualité », mais l’épisode de 2007-2008 a suffisamment montré que le réputé triple-A parfois ne valait pas tripette… Le débiteur est alors prié de compenser par de nouveaux apports, mais en une conjoncture de crise où très probablement ses positions sont en train de se détériorer à grande vitesse, et où sa liquidité se trouve mise sous haute tension. En d’autres termes, le fonds débiteur doit se procurer un supplément d’actif collatéralisant, et pour ce faire, d’abord de la liquidité, au moment précis où celle-ci lui manque le plus — parfois au point de voir tous ses accès aux financements de marché brutalement interrompus. Comme on sait, ce sont ces tensions ingérables sur la liquidité qui ont électrocuté tout le système financier par les circuits de la collatéralisation (et des appels de marge) en 2007-2008.
Du côté des créanciers qui reçoivent ces collatéraux, les choses ne sont pas plus sûres. Compte non tenu des problèmes soulevés à l’instant, les opérations de collatéralisation ne rempliraient vraiment leur office de back-up que si les collatéraux étaient rigoureusement conservés dans des comptes sanctuarisés. Mais qui peut croire qu’une banque pourrait ainsi mettre soigneusement de côté, en s’abstenant d’y toucher, les actifs qu’elle reçoit en collatéralisation de ses crédits ? Lorsque ceux-ci sont de bonne qualité (ou supposés tels), ils constituent une ressource financière qu’aucune banque ne consent à laisser oisive. Aussi la banque va-t-elle se défaire sans tarder du collatéral qui normalement la couvre, soit pour à son tour collatéraliser une de ses propres opérations quand elle se trouve du côté débiteur, soit pour retourner au cash en le vendant dans le marché. Il est désormais toute une partie des marchés monétaires, dite « Repo » (pourRepurchasing), qui procure de la liquidité à court terme contre collatéraux — et où ceux-ci circulent hardiment. Et lorsque vient le coup de grisou, i. e. le défaut d’un débiteur, par exemple d’un hedge fund, où est le collatéral ? Parti depuis belle lurette pour servir à prendre d’autres positions, dont certaines seront très probablement devenues perdantes en temps de crise — évidemment, tout comme la liquidité, la collatéralisation fait partie de ces « sûretés » qui fonctionnent très bien… quand elles n’ont à protéger de rien.
Comme souvent en matière de finance, le diable est dans les détails, ou plutôt dans d’obscurs recoins techniques, à l’image, par exemple, de la question des exigences de marges dans les transactions sur dérivés — dont on jugera a contrario du caractère stratégique à la manière dont les velléités du Dodd-Frank Act en cette matière ont été soigneusement annihilées par le lobbying bancaire des Etats-Unis. La « gestion des collatéraux » en fait tout autant partie. C’est en effet par ce genre de canaux que se propagent les spasmes de la finance. Au lieu de se gargariser avec l’illusion des « transactions sécurisées », le législateur socialiste s’il avait deux sous de volonté régulatrice, réformerait drastiquement les dispositions relatives au traitement des collatéraux — ou plutôt en instituerait, puisque en ce domaine, les opérateurs financiers font exactement ce qu’ils veulent. On mesurera d’ailleurs l’inanité du socialisme de gouvernement à ce fait qu’il réussit même à être en retard sur l’autorégulation de la finance ! Car les banques elles-mêmes, pour le coup conscientes de ce qui a failli les tuer, commencent à se préoccuper sérieusement de modifier leurs pratiques en matière de collateral management [6] — jusqu’au point d’envisager de réserver les collatéraux pour leur faire jouer pleinement leur rôle de sécurité.
Malheureusement, l’autorégulation bancaire est affligée d’une lamentable inconstance. Sous le coup d’une peur bleue, les banquiers jurent qu’ils ont retenu la leçon et qu’on ne les y prendra plus… L’expérience montre pourtant que leurs bonnes résolutions s’évanouissent avec le temps qui les éloigne du traumatisme, pour être complètement oubliées quand revient l’euphorie de la bulle d’après. Ce que le législateur socialiste n’a visiblement pas bien compris, c’est la force de la loi, ou du règlement, seuls à même de tenir des autorégulés dont la « constance » est entièrement gouvernée par leurs affects du moment. Parmi toutes les œuvres utiles que ce texte de loi aurait pu accomplir, il y avait donc l’institution d’une stricte obligation de mise sous séquestre des actifs reçus en collatéral — et déjà l’on aurait entendu Frédéric Oudéa commencer à couiner. Proposition tout à fait générale et qui n’excluait en fait nullement d’interdire purement et simplement toute transaction des banques avec les hedge funds et le shadow banking system — après tout, on verra bien comment ces jolis messieurs se débrouillent privés de crédit bancaire.

Quelle séparation ?

Non seulement la matière séparée, à force d’exemptions et de validation des pratiques ordinaires, est-elle tendanciellement inexistante (1,5 %), mais la forme même de la séparation a tout du concubinage prolongé. De ce point de vue, la « Volcker Rule », les rapports Vickers et Liikanen, ainsi que le projet Moscovici ont au moins en commun le même entêtement dans le contresens, et la même illusion de la « capitalisation séparée », alias : on range les activités « à problème » dans une filiale soumise à des ratios de capital (Tier-1) « plus exigeants », et nous voila parés contre tout inconvénient.
C’est n’avoir toujours pas compris que les ratios de solvabilité sont parfaitement secondaires dans ces processus de crise financière qui n’explosent que par le retournement brutal des jugements sur une classe d’actifs et la constriction foudroyante qui s’ensuit de la liquidité du segment de marché correspondant, puis de tous les segments latéraux, atteints de proche en proche par les effets de report de la ruée vers le cash [7]. On rappellera donc pour la énième fois que Bear Stearns et Lehman Brothers se sont effondrés avec des Tier-1 très au-dessus des minima réglementaires les plus exigeants. Après cinq années laissées à la méditation soigneuse des mécanismes et des conséquences de la crise financière, on est un peu consternés que les apprentis régulateurs n’aient toujours pas saisi que les plus belles capitalisations séparées ne protègeront jamais une banque de marché du désastre.
En réalité, la seule mesure faisant quelque peu sens en cette matière est celle proposée par Goodhart et Persaud de rendre les ratios de solvabilité contracycliques [8] : plutôt que d’être fixées une fois pour toutes, les exigences de fonds propres croîtraient proportionnellement aux prix de marché d’une certaine classe d’actif suspecte d’être en proie à une bulle, et des encours de crédit qui s’y déversent. Encore faut-il ne pas se méprendre sur l’effet véritable de cette mesure, qui a moins, comme on le répète à satiété, pour propriété principale d’épaissir le « coussin de capital permettant d’absorber les pertes », que de resserrer progressivement la capacité des banques à accorder des crédits dans le segment de marché considéré, donc de ralentir le développement de la bulle. En d’autres termes, les ratios de capital contracycliques ne participent pas tant, comme on le croit le plus souvent, d’une politique prudentielle que d’une politiquemonétaire (mais poursuivie par d’autres moyens), puisqu’il s’agit moins de renforcer la base de capital des banques que de réguler leur offre de crédit.

Misère de la filialisation

Les contresens de principe n’excluant pas ceux d’exécution, le recours à la filialisation, par opposition aubank split en bonne et due forme, vient porter la complaisance régulatrice à son comble. Karine Berger s’exclame en commission des finances qu’en cas de pépin, la filialisation laisserait intacte à coup sûr la maison-mère — dépositaire des encaisses monétaires de la clientèle des particuliers. Car le texte de loi stipule que la filiale de marché doit être traitée par sa holding comme une entité extérieure, en conséquence de quoi lui sera appliquée la directive « grands risques » qui interdit à une banque de concentrer plus de 10 % de ses fonds propres dans des engagements risqués sur une seule entité. La banque holding ne pourrait donc se livrer à un éventuel renflouement de sa filiale au-delà de cette limite, en foi de quoi Karine Berger croit pouvoir conclure qu’« à [son] sens c’est la garantie d’une étanchéité absolue en cas de faillite d’une filiale vis-à-vis de la maison-mère » [9]. Il est cependant possible que « son sens » ne soit pas celui auquel il faille se confier aveuglément, et pour de nombreuses raisons.
En premier lieu, l’« étanchéité absolue » est tout de même autorisée à laisser passer 10 % des fonds propres… En second lieu, le règlement n°93-05 de la Banque de France, relatif au contrôle des « grands risques » [10], indique que le volume de risques sur une seule entité s’entend comme « risques nets pondérés », ce qui signifie que le volume brut de crédit de secours apporté par la holding à la filiale pourrait aller bien au-delà du seuil des 10 % de fonds propres. C’est bien ce volume brut qui importe en situation de crise, où comptent avant tout les ressources mobilisables pour faire face à une crise majeure de liquidité. On peut donc gager que la holding fournirait tout ce qu’elle peut à sa filiale pour la sauver, jusqu’au point où ses engagements bruts sur cette dernière excèderaient significativement 10 % de ses fonds propres — 10 % tout ronds, pour BNP-Paribas, ça fait tout de même déjà 7,5 milliards d’euros, une paille si la filiale venait en bout de course à faire défaut pour de bon. Mais comme toujours dans cette affaire, le danger n’est pas tant de manger les fonds propres que de se trouver face à des besoins urgents de liquidité impossibles à satisfaire. Or, précisément, en situation de crise, la liquidité est LE problème, et pour tout le monde. Qui peut imaginer que le spectacle d’une holding contrainte d’apporter dans la précipitation des concours à sa filiale, donc qui exprimerait des besoins de liquidité massifs, laisserait les opérateurs de marché indifférents, et qu’en serait-il alors de la possibilité effective pour cette holding de les financer ?
C’est en général à ce moment que la question de la solvabilité, objectivement secondaire, n’en fait pas moins retour, mais sous la forme vicieuse d’un accélérateur de panique. Car, pour tous leurs défauts de pertinence, les ratios de solvabilité n’en sont pas moins scrutés par les opérateurs des marchés de gros du crédit [11], où ils sont interprétés comme un signal sur la qualité des débiteurs… même pour la fourniture de liquidités de court terme [12]. C’est tout le charme de la finance de marchés que la croyance y fait loi : il suffit donc que le jugement des opérateurs se cristallise sur un indicateur quelconque pour que celui-ci acquière une importance, et un pouvoir d’entraîner des effets, qu’il ne possède nullement par lui-même. Si les opérateurs se mettent — et c’est le cas en situation de crise ! — à considérer que les débiteurs doivent être jugés d’après leurs ratios Tier-1 et que seuls les meilleurs auront accès à la liquidité, malheur à celui qui vacillera en cette matière : ses sources de financement se fermeront les unes après les autres, jusqu’à l’apoplexie finale… semblant donner raison à la « théorie » qui se sera en effet révélée « vraie »… mais pas du tout pour les raisons qu’elle croit. En tout cas voilà aussi ce qui pendra au nez de la holding encombrée d’une filiale de marché en train de prendre l’eau : car la holding devra consolider les pertes de cette dernière… et voir ses propres ratios de solvabilité prendre sérieusement de la gîte. Avec menace subséquente sur sa propre capacité à maintenir la continuité de ses financements… au moment où ils devraient être le mieux garantis pour venir au secours de la filiale en perdition.

Pour une loi d’apartheid bancaire

A part ça, Karine Berger voit dans la (fausse) séparation par filialisation « une garantie d’étanchéité avec la maison-mère ». « A [son] sens ». Mais tout est faux, « au sens » de n’importe quel autre regard tant soit peu décidé à tirer les conséquences de ce qui s’est passé, dans les invraisemblables préventions dont ce texte de loi fait preuve à l’égard de ce qu’on présenterait sans exagération comme le plus grand pouvoir de destruction sociale — mais celui-ci est en costume trois pièces, en vertu de quoi il passe rigoureusement inaperçu… en tous cas aux yeux de ses semblables. Pour qui pourtant veut bien se donner la peine de simplement s’y pencher, l’histoire économique, et sur tous les continents ou presque, regorge d’épisodes attestant la nocivité des marchés de capitaux libéralisés. La moindre des réponses à la crise présente, sans doute l’une des plus graves de toute l’histoire du capitalisme, ne pourrait viser en dessous de la ségrégation complète des activités de marché, dont il faut redire, et là encore attestation historique en main, qu’elles ne rendent aucun service important, ou presque, que le simple crédit bancaire ne saurait rendre («  et la Bourse des actions ! », s’écrient alors éperdus les amis de la finance de marché, même sous le fordisme il y en avait une — c’est qu’il n’était pas allé assez loin et ne s’était pas aperçu qu’on peut carrément s’en passer [13]).
Par une indulgence en fait coupable, on pourrait tolérer qu’il demeure des activités de marché. Mais sous l’interdiction formelle faite aux banques de dépôt d’avoir le moindre contact avec ceux qui s’y livrent. Comme on pouvait s’y attendre, la première protestation apeurée (bien à tort) des banquiers français est allée au rappel de ce que le modèle de banque n’était pour rien dans cette affaire, qu’on avait vu de pures banques de marché, comme Bear et Lehman, aller au tapis, et que les banques universelles « à la française » s’était très honorablement comportées. Sauf vaine discussion sur les points d’honneur de la profession bancaire, et le « comportement » réel des banques françaises à l’épreuve de la crise, on appréciera davantage le culot de ces messieurs. Qui sont touchants de candeur de nous enseigner que, oui, être assis sur le tas des dépôts aide bien à amortir les gamelles ! On en est donc arrivé au point où il faut leur rappeler que l’argent du public n’a pas exactement pour vocation de les aider à tenir plus confortablement le choc de leurs pertes spéculatives — on mesurera d’ailleurs l’arrogance innocente de la finance qui, pour se défendre, ne voit même plus le mal à consentir l’aveu qu’elle compte exposer les dépôts aux risques de ses turpitudes spéculatives, et qu’elle est même bien contente de les avoir sous la main !
Même le banking split complet [14], en lieu et place de la filialisation et des conceptions passablement Titanic que Karine Berger se fait de « l’étanchéité », ne suffirait pas à apporter une réponse satisfaisante. Il faut couper absolument toute connexion entre les institutions de dépôts et les banques de marché, non seulement, évidemment, tout lien capitalistique du type holding-filiale, mais tout lien de crédit ou de contrepartie avec n’importe quel acteur spéculatif, puisque c’est aussi par ce genre de canaux que les dépôts finissent par se trouver exposés. Ceci signifie qu’une banque commerciale ne pourra en aucun cas être impliquée dans une relation de crédit avec une banque de marché — en tous cas du côté créancier. Laquelle clause suppose alors d’instituer deux marchés interbancaires séparés. Voilà ce qui suit de prendre au sérieux l’idée de séparation bancaire : séparation dans tous les domaines ! Séparation des institutions bancaires elles-mêmes ; séparation de leurs conditions réglementaires (ratios de capital, leviérisation, etc.) ; séparation des marchés interbancaires ; et comme on l’avait proposé il y a quelque temps déjà [15], séparation des taux d’intérêts de la banque centrale pour les refinancements respectifs des banques commerciales et des banques de marché [16].
Si le socialisme de gouvernement n’était pas complètement colonisé de l’intérieur par la finance, s’il lui restait quelques audaces et s’il avait pris un tant soit peu la mesure des désastres que la finance de marché a infligés au corps social, ça n’est pas cette indigente loi de « séparation » qu’il lui imposerait. Mais une loi d’apartheid.

Notes

[1] Compte-rendu n°60, commission des finances, séance du mercredi 30 janvier 2013, p. 7.
[2] Un internaute, Veig, fait remarquer à raison que si Karine Berger ne touche plus, elle a touché, et même considérablement puisqu’elle était économiste chez Euler-Hermès, société d’assurance-crédit
[3] Benjamin Masse-Stamberger, « Réforme bancaire : des lobbys très investis », L’Expansion, 5 décembre 2012.
[4] La SFEF (Société de financement de l’économie française) pour les crédits de secours et la SPPE (Société de prise de participation de l’Etat) pour les apports en (quasi) fonds propres.
[5] Dont 77 milliards au titre des prêts de la SFEF et 20 milliards au titre des prises de participation de la SPPE.
[6] Voir Anuj Gangahar, « Default protection : collateral management grows in strength », Financial Times, 19 septembre 2011.
[7] Voir « L’effarante passivité de la “re-régulation financière” », in Les Economistes Atterrés, Changer d’économie, Les Liens qui Libèrent, 2012.
[8] Charles Goodhart, Avinash Persaud, « How to avoid the next crash », Financial Times, 30 janvier 2008.
[9] Compte-rendu n°63, commission des Finances, séance du mercredi 30 janvier 2013, p. 10.
[10] Périodiquement sujet à révision, la dernière datant du 23 novembre 2011.
[11] Pour éviter toute confusion, il est utile de préciser que, en dépit de leur appellation, les « marchés de gros du crédit » ne produisent pas stricto sensu du crédit, opération de création monétaire dont seules les institutions bancaires sont capables, mais offrent des financements obligataires.
[12] Tandis que la solvabilité est typiquement un indicateur de robustesse financière de long terme.
[13] Pour une exposition détaillée de cette proposition, voir « Et si on fermait la Bourse », Le Monde Diplomatique, février 2010.
[14] C’est-à-dire l’extraction de toutes les activités de marché, placées dans une nouvelle entité n’ayant aucun lien capitalistique avec la banque d’où elles ont été sorties.
[16] L’idée étant de pouvoir tuer une bulle au début de sa formation en portant les refinancements des banques de marché à des taux d’intérêt meurtriers sans nuire par ailleurs au prix du crédit à l’économie réelle.

Emad Burnat , réalisateur d'un film ( Cinq caméras brisées) émouvant , juste et tout simplement beau digne , comme l'est la résistance palestinienne a été retenu par les douane état unienne de Los Angelès alors qu'il venait "accompagné" son film nommé aux Oscars , une humiliation de plus pour ce peuple ; ce soir je suis moi aussi écoeuré


Un Palestinien nommé aux Oscars retenu aux douanes à Los Angeles

Emad Burnat dans une scène de son film 5 Broken Cameras
Le réalisateur palestinien Emad Burnat a déploré mercredi avoir été retenu pendant plus d'une heure à la douane à Los Angeles, où il se rendait pour assister aux Oscars, pour lesquels il est nommé, comparant son expérience à celle de ses compatriotes en Cisjordanie.

 «La nuit dernière, j'ai été interrogé pendant une heure avec ma famille par les services de l'immigration américaine de Los Angeles sur les raisons de mon voyage aux États-Unis», a expliqué le réalisateur dans un communiqué.

 Emad Burnat est nommé dans la catégorie du meilleur long métrage documentaire pour son film 5 Broken Cameras. Le réalisateur y raconte le quotidien d'un Palestinien spolié de ses terres par l'installation d'une colonie juive.

 «Les douaniers voulaient la preuve que j'étais nommé aux Oscars et ils m'ont dit que si je ne pouvais justifier mon voyage, ma femme Soraya, mon fils Gibreel et moi-même, serions renvoyés en Turquie le jour-même», a-t-il expliqué.

 «Il s'agissait d'une expérience désagréable, mais les Palestiniens vivent cela quotidiennement en Cisjordanie», a-t-il ajouté. «Il y a 500 points de contrôle israéliens, des barrages routiers et de nombreuses barrières qui empêchent tout mouvement sur nos terres, et pas un seul d'entre nous ne passe à travers l'expérience que nous avons vécue aujourd'hui avec ma famille».

 L'incident avait d'abord été rapporté par le réalisateur américain Michael Moore sur son compte Twitter.

 «Apparemment les officiers de l'immigration étaient incapables de comprendre comment un Palestinien pouvait être nommé aux Oscars. Emad m'a demandé de l'aide par SMS», a-t-il tweeté.

 Dans un communiqué, l'agence américaine des douanes et de protection des frontières (CBP) a affirmé «traiter tous les voyageurs avec respect et professionnalisme, dans le respect de notre mission de protection des citoyens et des visiteurs aux États-Unis».

 «Les voyageurs peuvent être soumis à de plus amples recherches pour une multitude de raisons, notamment la recherche d'identité, les buts du voyage et la confirmation de l'autorisation de rentrer sur le territoire», a ajouté l'agence qui a refusé d'entrer davantage dans les détails pour des raisons de confidentialité.

Source La Presse via Serges Adam

mardi 19 février 2013

La carambouille des chevaux de Roumanie est une très vieille affaire , et elle dure.....


Cet article avait été proposé en 2011 et pas retenu, et voilà que, grâce à Findus et aux suédois, il refait surface

Roumanie, chronique d’un massacre pour nos boucheries chevalines
Il y a quelques mois, en février 2011, un article paraissait dans la presse roumaine, signé Cornel Ivanciuc, dont voici de larges extraits, traduits en français :
Son titre : « Y aurait-il en Roumanie une mafia de la viande, en liens avec des français et des italiens notamment ? »
« Lorsqu’il était Ministre de l’Agriculture roumaine, Gheorghe Flutur a été contacté par le patron du « complexe de viande de Bordeaux ». En date du 22 mai 2006 ce patron a même écrit au Ministre, précisant que, « suite à ses nombreux voyages en Roumanie, je vous réitère ma proposition d’acheter tous les chevaux malades (atteints par l’AIE, anémie infectieuse équine) soit environ 14 à 15.000 chevaux ».
« L’offre de ce français (qui répond à un nom basque bien connu du côté de Bayonne)* présentait une cotation, soit 200 euros la tonne, et une proposition de lieu d’abattage, à savoir dans les locaux de la Société Européenne de Sibiu, Strada Ecaterina Teodoroiu nr. 39, société créée en 1994, avec une longue expérience dans le domaine de la commercialisation de viande de bovins, ovins et chevaux.
Il semble que cette offre ait été suivie d’effet puisqu’une grande quantité de chevaux roumains sont venus compléter la demande de l’Union Européenne de 2,3 millions de chevaux par an. Initialement le Ministre avait annoté le courrier en provenance de France d’un « rog analiz » (je demande une analyse), en date du 25 mai 2006. A cette époque la consommation de viande de cheval ne faisait pas l’objet d’une loi européenne. C’est seulement en 2009 que l’UE a fait ses premiers pas notamment dans le but d’interdire l’abattage des chevaux en vue de la consommation, pour des raisons sanitaires, puisque les médicaments pouvaient pénétrer l’organisme des consommateurs.
Toutefois le modèle « Flutur » semble avoir très bien fonctionné. Par exemple en avril 2010 étaient comptabilisés sur le territoire roumain 7.500 chevaux atteints de cette anémie infectieuse, dont 400 dans le département de Brasov. Ces derniers ont été sacrifiés dans un abattoir spécialisé et leur viande est partie vers l’Italie pour y préparer des saucissons secs…. 
En 2008, la Roumanie a exporté 3.300 tonnes de viande de cheval, dont une grande quantité provenait de ces animaux atteints de l’AIE. En 2009 ce sont 14.000 chevaux vivants qui ont été de nouveau expédiés vers l’Italie. Un rapport de la Direction pour l’alimentation et les services vétérinaires de la Commission Européenne a mentionné l’échec complet de l’identification des chevaux au moyen de « chips », en ce qui concerne la Roumanie. Ces chevaux sont encore et toujours sacrifiés dans des abattoirs illégaux, et les animaux malades continuent à ne pas être marqués donc restent non identifiables. » 
2 petits ajouts à ces extraits :
-Les paysans qui reçoivent la visite des services vétérinaires roumains touchent une indemnité de 350 lei par animal réquisitionné (soit 85 euros), à peine de quoi louer un tracteur pour retourner leur terrain la saison prochaine. Car en Roumanie un terrain agricole non entretenu entraîne automatiquement une amende de l’Etat… la boucle est bouclée … reste à vérifier si les responsables des services vétérinaires ont reçu des aides de l’UE pour investir dans les tracteurs agricoles …
-sur France 24, l’émission « Reporter » a programmé en juillet 2011 un reportage sur le futur abattage des chevaux sauvages, en liberté dans le Delta du Danube (une réserve naturelle de plus de 3.000 km² enregistrée dans le projet Nature 2000 de l’Union Européenne). Ces chevaux sont plusieurs milliers, ne sont pas malades, et paraît-ils abiment les cultures !?!?
 Nul doute qu’un lien existe entre ce besoin en viande de cheval sur les étals de France et d’Italie et ce massacre programmé. Nul doute que ce sont les mêmes margoulins qui sont derrière. Nul doute que les projets de l’Union Européenne ne sont pas vus de la même manière selon qu’on se trouve à Bruxelles, Bucarest ou Bayonne !

*il s’agit de Mr. Harinordoquy

Jean Ziegler: la faim est un crime contre l'Humanité. Il peut enfin dire qui sont ces canailles


Jean Ziegler peut enfin dire «qui sont les canailles»

Source : Le Matin, octobre 2012
TÉMOIGNAGE — «Il y a aujourd’hui assez pour nourrir douze milliards d’êtres humains.Si des gens meurent de faim, c’est à cause de la spéculation, dénonce Jean Ziegler.
«Je peux dire enfin qui sont les canailles», répond le Genevois, interrogé sur ce qui le motive à témoigner encore et toujours sur la faim dans le monde. Pour la sortie de la version allemande son livre «Destruction massive. Géopolitique de la faim», Jean Ziegler fait lundi la Une du Tages-Anzeiger. Il dit avoir consigné ce qu’il a appris de 2000 à 2008 comme rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation.
«Longtemps j’ai dû me taire, parce que j’étais quotidiennement en contact avec des grands groupes, le Fonds monétaire International, la Banque mondiale et de nombreux chefs d’État», explique le sociologue, qui avoue que son silence lui a été pénible. Il s’est même «souvent senti comme un traître», par exemple en rejoignant les paysans mayas guatémaltèques dans sa grosse Toyota blanche frappée aux armes de l’ONU.
De l’espoir tout de même
«Ces gens très pauvres me regardaient les yeux plein d’espérance et je savais que je ne pouvais pas satisfaire leurs espoirs. Lorsque je leur demandais la seule chose qui puisse les aider, je savais que je n’avais aucune chance de faire passer l’idée d’une réforme agraire et que celle-ci serait balayée trois mois plus tard à New York», note l’ancien professeur et politicien genevois.
Jean Zieger dit ne pas être désillusionné pour autant. Son ouvrage, dit-il, est «aussi un livre de l’espoir». Car pour la première fois dans l’Histoire de l’humanité, il serait aujourd’hui possible de nourrir tout le monde.
«Le fait qu’un enfant de moins de 10 ans meurt de famine toutes les cinq secondes et que près d’un milliard d’êtres humains sont fortement sous-alimentés relève du massacre». C’est une sorte de «crime organisé», commente-il.
Pas coupables mais complices
Nous ne sommes pas coupables de cette situation dont nous n’avons pas conscience, admet l’ancien conseiller national socialiste connu pour ses positions altermondialistes. «Mais nous sommes complices en tolérant que des multinationales et des spéculateurs décident chaque jour de qui mangera et vivra et de qui aura faim et mourra».
Questionné sur ce que nous pouvons faire comme individu, Jean Ziegler répond que l’action politique est plus efficace que de faire des dons ou de restreindre sa consommation de viande, même s’«il y a lieu de s’interroger dès lors qu’un quart des céréales produites sert à engraisser le bétail de boucherie».
Il est possible d’agir à l’échelon politique, ajoute-il, «car nous vivons dans une démocratie». «Nous pourrions par exemple faire exclure les non-producteurs et les non-utilisateurs directs de produits alimentaires des bourses aux matières premières.»
« Il faut savoir qu’au moment où les États de la zone euro libéraient 1 700 milliards pour remobiliser le crédit interbancaire, dans le même temps, ils coupaient d’un tiers le financement de l’aide alimentaire d’urgence. Or, 71 millions de personnes dans le monde ne vivent que de cette aide »
Un milliard d’êtres humains sont en permanence gravement sous-alimentés. « Un milliard de crucifiés dès la naissance ! Alors que la FAO indique que l’agriculture mondial peut nourrir sans problème 12 milliards d’êtres humains, soit le double de l’humanité présente. Un enfant qui meurt de faim est assassiné », ajoute le sociologue.

« Autrefois, les enfants du Sud mouraient sous l’esclavage et la colonisation. Aujourd’hui, ils meurent sous le capitalisme globalisé », affirme-t-il.

Les Chinois comme les Impérialistes du 19e siècle
«Les paysans travaillent dur», répond Jean Ziegler questionné sur les faibles rendements de l’agriculture en Afrique. «Mais ils n’ont aucun soutien: ni irrigation, ni semences, ni bêtes de trait, pas de tracteur, pas de fertilisants de synthèse, rien de rien».
«Ils ont un grand savoir-faire», mais plutôt que de les aider, on tire prétexte de ce manque de ressources et de rendement pour les déposséder des terres les plus fertiles, explique Jean Ziegler. «Selon la banque mondiale, on leur a déjà pris 41 millions d’hectares de terres arables».
L’arrivée d’investisseurs chinois ne change rien, «au contraire». Ils se comportent en Afrique «comme les Impérialistes occidentaux du 19e siècle». Pour Jean Ziegler, «la Chine est une dictature qui pratique le néo-libéralisme et qui s’est adaptée au mieux au capitalisme prédateur».
«Pékin soutient au Soudan une dictature qui mène une guerre abominable contre son propre peuple», ajoute l’ancien rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation. Ce «uniquement parce qu’ils s’intéressent aux réserves de pétrole».

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