L’instauration d’un gouvernement par la force présentée comme une victoire démocratique, la célébration de l’arrivée au pouvoir d’activistes fascisants comme celle de combattants de la liberté : même nos médias ont de la peine désormais à nous vendre la mascarade ukrainienne.
La composition du « gouvernement de transition » ukrainien reflète le script défini par la secrétaire d’Etat adjointe Victoria Nuland, dans son désormais célèbre échange téléphonique avec l’ambassadeur américain à Kiev, au nom du président Obama. En effet, elle déclarait que « Yats » (Arseni Iatseniouk) devait être au pouvoir, contrairement à « Klitsch » (Vitali Klitschko), et que les néonazis de Svoboda (Liberté) et de Pravy Sektor (Secteur de droite) – l’aile terroriste du mouvement de l’Euromaïdan – avaient leur place aussi au gouvernement.
Le voici :
Communiqué officiel du 27 février 2014 sur la composition du nouveau gouvernement
Analysons plus en détail…
Le Premier Ministre
Le nouveau Premier ministre est le banquier Arseni Iatseniouk, 39 ans.
C’est le président de Batkivchtchina (« Patrie »), le parti de l’oligarque Ioulia Timochenko.
Favori des États-Unis, il connaît bien le régime ukrainien pour y avoir occupé tous les postes-clés : président du Parlement, Ministre des Affaires étrangères, Ministre de l’Économie, président de la Banque centrale. Il y a appliqué alors avec zèle une ligne pro-européenne et de soumissions aux diktats du FMI. Il a obtenu à la Présidentielle de 2010 le score non soviétique de … 7 % des voix.
Il a déjà déclaré lui-même qu’il deviendra probablement « le Premier ministre le plus impopulaire » de l’histoire de l’Ukraine, puisque le gouvernement imposera des sacrifices tels qu’on doive parler de « mission kamikaze ». La bureaucratie de l’UE, paraît-il, appelle déjà l’Ukraine « la Grèce de l’Est ». Il est très proche de l’Allemagne et de l’UE.
Il dirige un cabinet des horreurs composé d’un côté de partisans d’une austérité brutale, qui feront tout pour remplir les conditions de l’UE, du FMI et des États-Unis en échange de l’aide financière, et de l’autre côté, d’extrémistes qui veulent nettoyer l’Ukraine de certains groupes ethniques ou minorités linguistiques, réhabiliter des collaborateurs de l’époque nazie comme Stepan Bandera et continuer à provoquer la Russie…
Le secrétaire d’État américain John Kerry (c) avec le président ukrainien par intérim Olexandre Tourtchinov (g) et le Premier ministre Arseni Iatseniouk (d), à Kiev, le 4 mars 2014
Le gouvernement comprend 4 factions : les ultra-libéraux / les européistes, une pincée de société civile issue de Maidan, les nazis et les voyous (le cumul est ici possible, et même largement pratiqué…). Un mélange hétéroclite mais cohérent : des banquiers prêts à obéir au FMI, de « businessmen » nés de la chute de l’URSS formés aux États-unis, des « ministres professionnels » pro-européens, trempés dans les scandales de corruption, proches des clans oligarques.
Les ultra-libéraux

Il supervisera désormais la Défense, l’Intérieur et les Affaires étrangères, ainsi que le Conseil National de Sécurité et la défense du Conseil national.



Spécialiste du consulting privé en droit, il a été pendant plusieurs années Conseiller général de la Caisse des bons du trésor ukrainienne, une des premières banques du pays.

Président du Sous-comité du Parlement sur la stratégie de développement de la politique douanière de libre-échange, et conseiller de Yatseniuk pour la politique étrangère.

Il a 38 ans et est député de “Patrie”.
“Ultra-libéral” n’est pas excessif : les premières “réformes du gouvernement ont été dévoilées vendredi :
- réduction des pensions de retraite de 50%, pour ceux qui continuent de travailler, sachant que la retraite moyenne est 150$ en Ukraine ;
- augmentation de l’impôt agricole, donc augmentation des prix dans ce secteur ;
- augmentation des tarifs du gaz et du chauffage urbain ;
- paiement des frais de séjours et de nourriture par les malades dans les hôpitaux publics ;
- fin de la prime de 20% versée aux personnels des équipes de SAMU ;
- augmentation du temps de travail des enseignants ;
- augmentation des tarifs des cantines scolaires de 50 % ;
- fin de la gratuité des établissements sportifs d’enseignement ;
- baisse du financement des théâtres publics ;
- instauration d’une contribution de 20% sur les tickets de cinéma, au profit du ministère de la culture.
Les premiers gouverneurs des régions (oblasts) ont été nommés :
- à Dnepropetrovsk, a été nommé comme nouveau gouverneur Igor KOLOMOÏSKI, l’un des plus grands oligarques du pays : propriétaire du groupe “PRIVAT” qui comprend plus d’une centaines d’entreprises dans tous les domaines (banque, métallurgie, pétrochimie, médias …) et champion de l’évasion fiscale par des structures offshore (principalement à Chypre). Son chef de l’administation est un oligarque de niveau moins élevé dans le domaine pétrochimique Guennadi KORBAN ;
- à Donetsk, a été nommé comme nouveau gouverneur le milliardaire Sergueï TAROUTA, principal actionnaire du groupe métallurgique ISD (Union industrielle du Donbass), fondé avec Vitali GAÏDOUK (vice-gouverneur de la région de Donetsk à l’époque où Ianoukovitch dirigeait la région) ;
- à Odessa, c’est un oligarque de la métallurgie, Vladimir NEMIROVSKI, financeur d’Arseni IATSENIOUK, l’actuel premier-ministre, qui a été nommé gouverneur.
Bref gros changement au niveau des oligarques…
Le parti communiste a protesté :
“Cette décision illustre l’essence carrément antisociale du nouveau gouvernement, qui, en outre, ne peut pas être appelé autrement que gouvernement du fascisme social. Les communistes ont à plusieurs reprises parlé des moyens réels de remplir les caisses de l’Etat. Nous avons appelé et le précédent et l’actuel gouvernement à imposer des taxes supplémentaires sur les riches et sur les comptes offshore, de nationaliser les grandes industries. Mais de toutes les façons possibles de réduire le déficit budgétaire, il a été choisi la plus simple : réduire les pensions de retraite.”“Ce sont tous les mêmes lobbyistes des grandes entreprises qui préfèrent déshabiller retraités que de mettre la main dans la poche de leurs commanditaires milliardaires”.” Et maintenant, le nouveau pouvoir , qui toutes ses forces “se précipite vers l’Europe”, à l’occasion de son triomphe, a décidé de faire un cadeau pour les retraités qui travaillent : réduire leurs pensions de moitié. je ne n’essaierais en aucune façon de blanchir le régime de Mrs. IANOUKOVITCH et AZAROV. Ils ont fait des folies, mais au moins les pensions de retraite, même un peu, ont été augmentées par eux. Mais le nouveau gouvernement démocratique a commencé son travail avec des plans pour leurs réductions “
Ceci étant, cela devrait se calmer : Svoboda vient déjà de déposer une proposition de loi visant à interdire l’idéologie communiste en Ukraine. Le 23 février, le projet de loi n° 4201, enregistré à la Rada (parlement ukrainien), propose l’interdiction du Parti communiste d’Ukraine.
Les européistes



Les néo-nazis (6 ministres sur 19 – et pas les moindres !)

“Les femmes feraient mieux d’apprendre a mener un genre de vie pour éviter le risque de viol, y compris celle de la consommation d’alcool et d’être en mauvaise compagnie.”

“L’attente du peuple ukrainien est de sortir de la corruption pour entrer dans l’Union européenne par la grande porte, tous ensemble. [...] Les révolutionnaires de Maïdan sont le cœur et l’esprit de cette résistance qui veut en finir avec ce gouvernement qui refuse l’Europe.” [Andrei Parubiy, 19/02/2014, Interview pour Métro]
Une chance, la presse française est là pour informer !


Il n’a aucune compétence en l’écologie, et est un farouche opposant des énergies renouvelables.
Cela va peut-être décevoir – comme le notent les médias ukrainiens – les multi-nationales qui avaient signé des accords pour ce type d’énergie, mais cela va rassurer par contre les multi-nationales du gaz, de l’électricité, du pétrole (qui peuvent être les mêmes…).
“En Égypte, les régime de Moubarak a duré 30 ans. L’Ukraine est dirigée par des personnes gens qui sont entrées en politique à l’époque de Brejnev – Shcherbytsky. Nous vivons une sorte de période “Moubarak collective”, y compris après les révolutions “orange” et “bleu-blanc”. Ainsi, il existe aujourd’hui en Ukraine les conditions de brassage pour une «troisième révolution» : elle sera à la fois sociale et nationale.” [Andrei Mokhnyk, 2011]

Avocat, il a été accusé par sa femme au moment de son 3e divorce d’avoir enlevé leur fils.
Il a également comparé la communauté vietnamienne de Kharkiv à une “tumeur maligne” qui absorbe les quartiers et les entreprises ukrainiennes. (Source : ONG ukrainienne Chesno)

Il a fréquenté dans sa jeunesse diverses organisations néo-nazies, dont le « Trident » (Trizub), organisation se revendiquant des groupes collaborateurs pendant la dernière guerre.

Héros des indignés à crânes rasés pour avoir organisé la logistique sur la place Maidan, il est aussi connu pour ses liens très étroits avec le groupe ultra-fasciste « Secteur Droit ».
Une chance, la presse française est là pour informer !
Dommage, Libération a oublié de nous parler de son parti : UNA-UNSO est un petit parti néo-nazi créé à Lviv en 1990 ; il se revendique du nationalisme ukrainien collaborant avec les nazis, et maintient des relations très proches avec le parti néo-nazi NDP :
Le salut néonazi qu’on voit assez régulièrement sur les vidéos à Maidan (cf plus bas)
D’autres dirigeants radicaux du Maïdan ont obtenu des postes importants dans les cabinets ministériels, dans l’agence anti-corruption et dans l’appareil judiciaire.

C’est un avocat d’affaires et ancien procureur dans la ville de Lvov (berceau des néo-nazis), dans l’ouest du pays. Pour Forbes Ukraine il est l’un des hommes d’affaires financeurs de la droite radicale ukrainienne.
Le procureur général dispose du pouvoir suprême sur le plan judiciaire, pouvant notramment lever l’immunité parlementaire pour faire inculper tout élu.

Détail malheureusement oublié par nos médias, elle a été membre de l’UNA-UNSO, dont elle a même été la responsable de la communication… ” (ici) Mains propre et tête haute”, quoi…


Spécialiste des médias [!], cette journaliste a longtemps été la correspondante de Voice of America.
Une chance, la presse française est là pour informer !
A noter que si les deux principaux dirigeants des partis d’extrême-droite ne sont pas au gouvernement, ce n’est pas parce qu’on les a exclus mais … parce qu’ils ont refusé les postes, préférant se préserver pour les prochaines élections.

Une chance, la presse française est là pour informer !

Le Time a indiqué : “Yarosh, dont la marque militant nationaliste rejette toute influence étrangère sur les affaires ukrainiens, a révélé pour la première fois que Pravy Sektor a amassé un arsenal d’armes mortelles. Il a refusé de dire exactement combien d’armes dont ils disposent. «C’est assez», dit-il, «pour défendre toute l’Ukraine des occupants internes» – par quoi il entend le gouvernement au pouvoir – et de poursuivre la révolution si les négociations avec ce gouvernement se décomposent.”
Le 1er mars 2014, il a appelé à l’aide l’émir du Caucase du Nord, Dokka Umarov (considéré par les Nations Unies comme un membre d’Al-Qaïda, et surnommé le “Ben Ladden russe”) en demandant à ce chef des terroristes tchétchènes de soutenir le peuple ukrainien par l’organisation de nouveaux attentats en Russie. Son “appel” a été mis en ligne sur la page de Pravy Sektor dans le réseau social russe V Kontakte. La réaction des Russes a été outrée, celle des occidentaux inexistante…
Harangue de Iarosh à Maidan (regardez la foule en détail…)
Il a été pris en flagrant délit de manipulation, en participant à une fausse vidéo d’un prisonnier ukrainien, nu, dans la neige, au milieu des forces de police qui se moquent de lui ont fait le tour du monde. Elles montrent la brutalité du régime que les glorieux manifestants de la place Maïdan tentent de renverser :
Petits problèmes, le prisonnier nu est en fait Iarosh, et à la fin de la séquence, on reconnaît en uniforme Andrei Dubovik. Or, M. Dubrovik a quitté il y a longtemps le ministère de l’Intérieur pour devenir le responsable de la sécurité de l’Union panukrainienne « Patrie » (Batkivshchyna) de l’oligarque Ioulia Tymochenko. Selon Vremia, ce film de propagande aurait été réalisé par Andriy Kozhemyakin, un réalisateur de télévision qui travaille également pour Madame Tymochenko…
On ignore ce qui a été proposé à Olexander Muzychko un des bras droits de Iarosh à “Secteur de Droite”. C’est un des combattants de Tchétchénie les plus abjects, et il s’est vu décerner, en 1994, par Djokhar Doudaïev, le commandant de l’époque des terroristes tchétchènes dans l’enclave d’Ichkérie, l’Ordre du Héros de la Nation, en hommage à « ses victoires militaires éclatantes contre les troupes russes ». Ses talents militaires étaient très spéciaux : il montait des opérations de guérilla, en attirant dans des embuscades les unités russes opérant dans les contrées reculées de la Tchétchénie. Il participait ensuite personnellement à la torture et aux décapitations des soldats russes capturés. À son retour en Ukraine en 1995, il a pris la tête d’un gang de criminels à Rovno. Il a fini par être poursuivi et condamné à huit années de prison pour l’enlèvement et le meurtre d’un homme d’affaires ukrainien. Il est entré en politique à sa sortie de prison, à la fin des années 2000.
Olexander Muzychko. Aujourd’hui à Kiev, et en Tchétchénie en 1994.
Les voyous



Admirez à la toute fin de la vidéo la réaction de la foule à l’annonce de son nom :
(NB. : les n° 2 et 3 cités ont ensuite refusé le poste…)
La société civile issue de EuroMaïdan

Cet ancien acteur a été surnommé la voix de Maidan pour sa présence sur la scène pendant 3 mois.
Sans expérience du monde de la Culture, sa nomination a entrainé des protestations dans le monde artistique.

Le bilan est léger… Ces miettes lancées aux « manifestants » n’ont pas convaincu beaucoup des « indignés de Maidan »…
Conclusion
La presse présente souvent le détail ainsi :
En fait, on a plutôt ceci :
C’est ce gouvernement que les ministres de la Défense des pays membres de l’OTAN ont qualifié de « clé pour la sécurité euro-atlantique »…
Arrêtons la mascarade et l’hypocrisie… Vous savez maintenant à qui nos dirigeants veulent confier le sort d’un des plus grands pays d’Europe…
Rappelons d’ailleurs la résolution sur l’Ukraine du Parlement européen du 13 décembre 2012 :
Le Parlement 8. s’inquiète de la montée du sentiment nationaliste en Ukraine, qui s’est traduit par le soutien apporté au parti «Svoboda», lequel se trouve ainsi être l’un des deux nouveaux partis à faire son entrée à la Verkhovna Rada; rappelle que les opinions racistes, antisémites et xénophobes sont contraires aux valeurs et principes fondamentaux de l’Union européenne et, par conséquent, invite les partis démocratiques siégeant à la Verkhovna Rada à ne pas s’associer avec ce parti, ni à approuver ou former de coalition avec ce dernier ;
Alors laissons le mot de la fin à Laurent Fabius le 11 mars :
“Il faut être pragmatique, aussi [!]. Il est évident que le gouvernement actuel de Ukraine cherche à opérer le plus large rassemblement. Donc il ne prend pas seulement ses partisans [?], et il essaie de rassembler. Et parmi ces éléments de rassemblement, il fait appel à des gens, je dirais, qui ont pignon sur rue [!]. Je comprends tout à fait ça.Maintenant quand on accuse ce gouvernement d’être d’extrême-droite, c’est faux ! C’est faux ! Il y a 3 membres [!] du parti Svoboda, qui est un parti plus à droite que les autres, mais l’extrême droite n’est pas au sein du gouvernement.” [Laurent Fabius, 11 mars 2014, France Inter]
Ouaip, ce sont juste des boys-scouts, quoi..
J’oublie toujours ce fait évident : ce gouvernement NE PEUT PAS être d’extrême droite, puisqu’on le soutient ! CQFD.
source: http://www.les-crises.fr/ukraine-oaodvd-5-2/
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