A Montluçon, le FN tente de s'approprier la mémoire des résistants
C'est à une incroyable scène à laquelle ont assisté les montluçonnais ce dimanche matin devant le monument qui commémore l'acte de résistance des montluçonnais le 6 janvier 1944. Alors que les anciens combattants, les élus, ainsi que des représentants des différentes familles politiques rendaient hommage à celles et ceux qui s'étaient allongé sur les rails ce jour là pour empêcher le train de partir pour l'Allemagne, une quinzaine de militants du FN ont fait irruption à la fin de la cérémonie avec la ferme intention de déposer une gerbe de fleurs devant le monument.
Cette inqualifiable provocation a suscité une vague d'indignation parmi la foule rassemblée. Ce sont les anciens combattants ainsi que des militants de la CGT, du Parti communiste, du Front de Gauche, du Parti socialiste et des Verts qui se sont instinctivement portés au-devant d'eux pour les empêcher d'accomplir ce geste sacrilège, aussitôt rejoints par les représentants de la majorité municipale et de l'UMP.
Soucieux d'apaiser les esprits, le Maire de Montluçon, Daniel Dugléry a demandé aux militants du FN de quitter les lieux, ce qu'ils ont fait, avec cependant beaucoup de réticence.
Le Parti des fusillés a immédiatement réagi dans un communiqué à la Presse le jour même :
Communiqué de presse du Parti communiste de Montluçon :
Aujourd'hui, 4 Janvier 2015, la commémoration du 6 janvier 1943, avait lieu place de la gare à Montluçon. Le Parti Communiste Français a fait partie du protocole et a déposé officiellement une gerbe de fleurs.
A l'issue de la cérémonie, le Front national ,sans aucune vergogne s'est avancé et a voulu faire de même. Les forces progressistes présentes ont empêché cet acte considéré par tous les présents comme une offense à l'égard des résistants et de toutes les personnes qui se sont allongées sur les voies ferrées le 6 Janvier 1943.Les idées nauséabondes de ces individus font du chemin. Ils osent tout. Soyons vigilants et réactifs. Notre liberté est en danger.
Pour la Section du Parti Communiste Français de Montluçon :
Fabienne Comiti, Secrétaire
Nanou Ferrier, correspondante de regard-Actu se trouvait sur place. Elle aussi s'interposa comme les autres entre le FN et le monument dédié aux résistants du 6 janvier 1944. Elle nous décrit cette scène surréaliste. Laissons-lui la parole :
La manifestation du 6 janvier 1943
Louis Bavay, dit Tilou pour le différencier de son père prénommé également Louis, revient des Chantiers de jeunesse le 10 novembre 1942. Le lendemain, il voit les Allemands entrer dans Montluçon. À cette époque, il y a plusieurs entreprises industrielles à Montluçon : la Sagem, Dunlop, les Fers Creux, Saint-Jacques. Leurs ouvriers sont directement menacés par la réquisition car les Allemands ont surtout besoin de métallurgistes. Tilou tente une première fois de s’opposer au départ de jeunes pour l’Allemagne le 29 décembre 1942, mais c’est un échec car les autorités se sont entourées d’un maximum de précautions pour opérer ce transfert.
Quand il entend parler d’un autre départ, il décide avec ses amis Pierre Katz, Marcel Zwilling, René et Lucien Marchelidon qui partagent ses idées communistes et antinazies, de s’y opposer.
Ils écrivent des messages sur les murs de la Sagem et de Dunlop afin d’inciter les Montluçonnais à manifester. Pierre Katz rédige un tract en allemand pour inviter les soldats incorporés de force dans l’armée allemande à rejoindre la Résistance avec leurs armes. La famille Barbat imprime de façon artisanale des tracts contre le départ des requis. A côté de l’action des Jeunesses communistes, il faut citer aussi l’action de Libération (Sud), du Comité des femmes et des cheminots.
Le jour de la manifestation, le 6 janvier 1943, il y a foule autour de la gare de Montluçon. Deux mille à trois mille personnes se sont rassemblées. Le groupe de Tilou Bavay enfonce le cordon de policiers français qui empêchent l’accès aux quais. Les Montluçonnais s’engouffrent dans la brèche et incitent les réquisitionnés à s’enfuir. Le chauffeur et le mécanicien se rangent de leur côté, tandis que le chef de gare, un collaborateur notoire, cherche par tous les moyens à faire partir le train. Des femmes se couchent sur la voie. Les groupes mobiles de réserve interviennent contre la foule qui les repousse à coups de pierres. Il faut l’intervention des soldats allemands baïonnette au canon pour que la foule se disperse.
Cependant, l’essentiel est atteint : sur les 120 requis qui se sont présentés à la gare, un peu plus de 80 se sont échappés. La répression ne se fait pas attendre. Une cinquantaine de requis sont très vite retrouvés et envoyés dès le lendemain outre-Rhin. Une quinzaine de manifestants sont arrêtés et se voient infliger des peines allant d’un à quinze jours d’emprisonnement. Les principaux responsables sont recherchés. Tilou Bavay a réussi à s’enfuir, mais son père est arrêté.
Cependant, trente à trente-cinq réfractaires ont pu échapper aux arrestations et la manifestation est citée par la radio de Londres quelques jours plus tard. La manifestation du 6 janvier a donc eu un retentissement mondial. Voilà rappelée à grands traits l'histoire de cette commémoration qui cette année avait lieu le 4 janvier .
Une commémoration qui prit tout son sens, peut-être même retrouva son sens, le sens essentiel, le seul en fait, lorsque le FN arriva pour déposer sa gerbe se réclamant de la Résistance, et assimilant Pétain et Hitler au socialisme, à la gauche . Plus que du révisionnisme, un renversement total de l'histoire .
Ici il y avait les élus municipaux , le Maire, des syndicats, des anciens combattants, des résistants de l'époque, des communistes,des anticapitalistes, des socialistes, des Front de Gauche, des non encartés, des vieux, des jeunes, des d'accord, des pas d'accord, or d'un seul coup et spontanément tout ce beau monde parfois si divisé a fait rempart contre le FN , sans mot d'ordre, sans préparation, mais tous avec cette même absolue nécessité de dire NON à l'impensable FN .
Fermement . Dignement . Sans répondre aux provocations ils ont fait ENSEMBLE un mur entre le monument rappelant ce jour de combat contre le nazisme et le FN . Un mur de silence. Un mur absolu . A Montluçon, ce sera NON au FN, à ses ridicules et fausses caricatures d'Histoire, çà sera NON à cette soi-disant résistance qui défend l'ignoble, le repli nationaliste et la haine de l'autre.
Une camarade dit haut , mais sans crier " Vous ne pouvez à la fois allumer les fours et déposer les Fleurs " ( Geneviève D G )
Il semble urgent et important de veiller à la défense de nos derniers symboles de lutte contre le nazisme, de lutte pour la Liberté . De ne point entendre les sirènes du révisionnisme d'extrême droite, de tenir ferme la barre !
De nombreuses fautes ont été commises et sont encore par cette République qui s'est servi et se sert des idées d'extrême droite les plus nauséabondes soit pour terroriser soit pour asseoir sa politique inique et anti-sociale . Ces fautes sont à reconnaitre par les uns et par les autres, si de République encore ils veulent parler .
Le sens de l'action de résistance de ce matin laisse penser que c'est possible, qu'au delà des électoralismes de bas étage, ils le sont tous, subsiste, résiste une idée non négociable de ce que doit être une société respirable, où l'Histoire a sa place , où l'Histoire doit prévenir du pire, où la haine de l'autre ne doit à aucun moment être tolérée .
En espérant que cet acte symbolique éveille, fasse prendre conscience du danger auquel nous sommes immédiatement confrontés
Nanou Ferrier
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