Il y a quelques jours se sont écoulés exactement neuf mois depuis la tragédie monstrueuse à Maison des syndicats. Les grands médias en France ont été plus que discrets sur ce massacre (le « Hatyn » d’Odessa, disent les Russes, car c’est l’équivalent pour eux d’Oradour-sur-Glane, NDT) et ceux qui en ont parlé n’ont pas dit la vérité. Le journal « Le Figaro », par exemple, sous la photo de la Maisons des syndicats d’Odessa en proie aux flammes a écrit qu’il s’agissait d’une bagarre entre fans de football.
Le blocus de l’information a été brisé par deux femmes – Irina Koval et Elena Radzikhovska de l’organisation ukrainienne des droits humains «Mères d’Odessa », qui du 26 Janvier (en fait, le 24, NDT) au 31 Janvier étaient en France, pour parler de ce qui s’est réellement passé à Odessa le 2 mai dernier. Et de ce qui se passe aujourd’hui en Ukraine.
En même temps que les mères d’Odessa une exposition photo se déplaçait de ville en ville, présentant les preuves des crimes de guerre perpétrés par les autorités de Kiev à Odessa et dans le Sud-est de l’Ukraine : le cadavre de la petite Pauline Sladkaia tuée par un obus à l’âge de 5 ans dans les bras de son père, la Madonne de Gorlovska, les larmes de Vanya le petit garçon mutilé. Un panneau à part était consacré aux œuvres du journaliste tué Andrei Stenine. A Paris, Strasbourg, Marseille, Lyon, Lille et Nice, ces femmes ont témoigné devant des salles entières apportant des preuves choquantes et inattendues pour les Européens pacifiques.
Elena Radzikhovska, professeur à l’Université d’Odessa, a raconté au public français qui se pressait dans une salle de conférence de Venissieux, comment les nationalistes débarqués du Maidan de Kiev avaient commencé à battre des personnes non armées sur le champ de Koulikovo, comment ils les ont contraints à se réfugier dans la Maison des syndicats, comment ils les ont brûlés et tués, achevant à coups de pieds et de matraques ceux qui réussissaient à sauter par les fenêtres. La police, comme ont sait, n’a pas essayé d’arrêter ce massacre.
Le récit des femmes est accompagné d’images vidéo sur un écran géant. Voici un homme qui saute par la fenêtre. Les nazis se jettent sur lui et l’achèvent à coups de pieds. Voici la célèbre photo d’une femme étranglée avec un câble sur une table dans la Maison des syndicats.
La salle est choquée. Une Française âgée dans la deuxième rangée se met à pleurer doucement. L’homme assis à côté, lui tend un mouchoir. Elena raconte comment son fils est mort. Elle n’a pas versé une seule larme de la soirée, elle a parlé très calmement. La faute de son fils André Brazhevski est d’avoir participé à une manifestation pacifique réclamant un référendum. Et c’est pour cela que les représentants du « Maidan démocratique» à Odessa l’ont tué.
Marie-Christine Burricand, élue communiste au Conseil municipal de Venissieux – Lyon métropole rappelle: «En France, dans un premier temps, personne ne comprenait quoi que ce soit. Même les communistes… La journaliste et sociologue Danielle Bleitrach, qui a beaucoup de contacts avec les communistes russes et ukrainiens nous a immédiatement alertés sur le crime commis à la Maison des syndicats à Odessa, et que c’était l’œuvre des nazis. Mais pour nous – les Français – au début, il était difficile de comprendre ce qui se passait. En juin dernier, nous avons invité Danielle à nous faire un rapport sur la situation en Ukraine. Et à partir de ce moment, nous avons décidé d’exprimer notre solidarité avec les rebelles dans le Donbass et plus globalement – la solidarité avec ceux qui refusent d’accepter le régime fasciste en Ukraine. Voilà comment cela a commencé. Aujourd’hui, nous comprenons que certaines forces tentent de déstabiliser l’Ukraine, puis de se frayer un chemin jusqu’à la Russie.
La visite de femmes ukrainiennes et leur campagne d’information a eu lieu à l’invitation du Parti communiste français et d’un certain nombre d’ONG françaises. Les visas et l’organisation du voyage étaient pris en charge par la Section de Vénissieux du Parti communiste.
– J’ai commencé à comprendre rapidement grâce à Internet. Certaines ressources en ligne – par exemple, un site qui combine plusieurs blogueurs de la région communiste de Paris, et d’autres. Et donc, même pendant le Maidan, nous avons pu apprendre qu’il y avait des fascistes – dit Gilbert Rémond. – Bien que personne ici ne nous le disait. Au contraire : la position officielle du Parti communiste était de soutenir les manifestants du Maidan – car ils auraient été pour la démocratie !
– Nous avons décidé de mettre en place un comité pour soutenir la Donbass – poursuit-il. – La première manifestation nous l’avons faite au début de juillet, au centre de Lyon. Nous avons distribué des tracts, les gens n’étaient pas hostiles. Des Ukrainiens et des Russes vivant dans la région ont commencé eux aussi à apporter leurs témoignages sur la situation. C’est également très important.
A une question de la salle sur le nombre de victimes, Elena a expliqué que le chiffre officiel était de 48 personnes, mais il ne tient pas compte des personnes portées disparues. Elle a demandé à ceux qui étaient présents d’aider les proches des victimes pour exiger une enquête internationale afin que que les meurtriers, dont l’identité est facile à établir grâce aux photos et aux vidéos qui ont été trouvées, soient jugés et punis. Car les autorités ukrainiennes ne sont pas disposées à enquêter sur les événements à Odessa le 2 mai, préférant emprisonner les personnes qui ont subi des violences, et les accusant de « mettre en danger la sécurité de l’Etat ».
A ma question de savoir si l’objectif de leur venue en France était atteint, si elle avait le sentiment d’être parvenue à quelque chose, Elena a déclaré :
– Nous avons visité plusieurs villes – Strasbourg, Paris, Marseille, Nice, Vénissieux. Et partout nous avons reçu un très bon accueil. Nous avons vu des gens différents. Et partout nous avons rencontré une attitude amicale, l’engagement et le désir d’aider à maintenir des contacts afin de se tenir au courant de ce qui se passe, et d’être en mesure de fournir un soutien. En tout cas, nous comprenons que notre tâche principale – est d’organiser la résistance elle-même – de l’intérieur. Mais le soutien international est absolument nécessaire. Permettez-moi de citer Albert Camus qui a dit: « Ne pas appeler les choses par leur nom – c’est ajouter au malheur de ce monde. » Eh bien, nous sommes ici pour faire que les choses soient appelées par leur nom.
PARIS VENISSIEUX correspondant spécial KP
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