La CIA a garanti à des hauts dignitaires et tortionnaires Nazis un « refuge sûr » aux Etats-Unis, révèle un rapport secret publié par le New York Times
Traduction AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/
Extrait d'un article publié initialement dans le New York Times du 14 novembre 2010 et répercuté par le site CubaDebate
Une histoire secrète de l'opération de chasse aux Nazis du gouvernement des Etats-Unis conclut que les responsables du renseignement Américain ont créé un « refuge sûr » aux Etats-Unis pour les Nazis et leurs collaborateurs après la seconde guerre mondiale, et elle détaille des décennies de conflits, souvent dissimulés, avec d'autres nations sur le sort criminels de guerre ici et à l'étranger.
Le rapport de 600 pages, que le Département de justice a essayé de garder secret pendant quatre ans, fournit de nouvelles preuves sur plus d'une vingtaine parmi les cas les plus notoires de dignitaires Nazis sur les trois dernières décennies. (...)
Le rapport dresse la liste à la fois des succès et des échecs de la bande d'avocats, d'historiens et de chercheurs du Bureau des enquêtes spéciales (OSI) du Département de la justice, qui a été créé en 1979 pour extrader les Nazis.
Peut-être que les révélations les plus accablantes de ce rapport viennent de l'étude qui est faite de la collaboration de la CIA avec des émigrés Nazis. Des universitaires et de précédents rapports gouvernementaux avaient admis l'usage par la CIA de Nazis à des fins de renseignement après la guerre. Mais ce rapport va plus loin en nous informant sur le niveau de la complicité et de la tromperie Américaine dans de telles opérations.
Le rapport du Département de la Justice, décrivant ce qu'il appelle « la collaboration du gouvernement avec les persécuteurs », affirme que les enquêteurs de l'OSI ont appris que certains des Nazis « avaient reçu en toute connaissance de cause la permission d'entrer » aux Etats-Unis, même quand les fonctionnaires étaient au courant de leurs antécédents. « L'Amérique, qui se targue d'être un refuge sûr pour les persécutés, est devenue – dans une
certaine mesure – un refuge sûr pour les persécuteurs également », déclare-t-il.
Le rapport rend compte également des divisions au sein du gouvernement sur les efforts, et les écueils juridiques, concernant la prise en compte des témoignages des survivants de l'Holocauste datant d'il y a plusieurs décennies. Le rapport conclut également que le nombre de Nazis qui ont pu se réfugier aux Etats-Unis était très certainement bien en-deçà des 10 000, chiffre souvent cité par les responsables gouvernementaux.
Base américaine : cela ne vous rappelle rien! |
Le département de la Justice a résisté à la publication de ce rapport depuis 2006. Sous la menace de poursuites judiciaires, elle a rendu une version lourdement expurgée le mois dernier à un groupe de recherche privé, le National security archive, mais même à ce moment-là, les partis les plus sensibles sur le plan légal et diplomatiques étaient omises. Une version complète a pu être obtenue par le New York Times.
Le Département de la Justice a déclaré que le rapport, produit de six années de travail, n'a jamais été formellement terminé et ne représente pas ses conclusions officielles. Il cite de « nombreuses erreurs factuelles et omissions », mais a refusé de
spécifier où elles se trouvaient. (…)
Le même base vue sous un autre angle |
En retraçant les cas de Nazis qui ont été aidés par les agents du renseignement Américains, le rapport cite l'aide que les agents de la CIA ont apporté en 1954 à Otto von Bolschwing, un associé d'Adolf Eichmann qui avait contribué à développer les plans initiaux pour« purger l'Allemagne des Juifs » et qui a plus tard travaillé pour la CIA aux Etats-Unis. Dans une série de notes de service, des responsables de la CIA débattent pour savoir quoi faire si von Bolschwing était attaqué sur son passé – soit nier toute affiliation Nazie soit « l'expliquer sur la base de circonstances atténuantes », affirme le rapport. (…)
Le rapport examine également le cas d’Arthur L. Rudolph, un scientifique nazi qui gérait l'usine de munitions de Mittelwerk. Il a été amené aux Etats-Unis en 1945 pour son expertise dans la fabrication de fusées dans le cadre de l'Opération Paperclip, un programme américain qui recrutait des scientifiques qui avaient travaillé en Allemagne nazie. Rudolph sera plus tard honoré par la NASA en tant que père de la fusée Saturne V.
Le rapport cite une note de service de 1949 du numéro 2 du Département de la Justice pressant des agents de l'immigration de laisser Rudolph revenir au pays après un séjour au Mexique, déclarant que si ce n'était pas le cas, cela« serait au détriment de l'intérêt national ».
Les chercheurs du Département de la Justice ont trouvé plus tard des preuves que Rudolph était engagé bien plus activement dans l'exploitation des travailleurs forcés à Mittelwerk que ce que lui ou les agents du renseignement Américains avaient admis, selon les dires du rapport. (…)
En 1980, les procureurs ont déposé une motion qui « dénaturait les faits » en affirmant que des vérifications dans les dossiers de la CIA et du FBI ne révélaient aucune information sur le passé Nazi de Tscherim Soobzokov, ancien soldat de la Waffen SS. En fait, selon le rapport, le Département de la Justice « savait que Soobzokov avait informé la CIA de ses liens avec la SS après son arrivée aux Etats-unis ». (…)
Le chapitre sur le Dr. Josef Mengele, un des Nazis les plus célèbres ayant pu échapper aux poursuites, détaille les efforts sophistiqués de l'OSI au milieu des années 1980 pour déterminer si il avait fui aux Etats-Unis et s'il pouvait être vivant.
Il décrit comment les chercheurs ont utilisé des lettres et des carnets apparemment écrites par le Dr. Mengele dans les années 1970, ainsi que des fiches dentaires Allemands et des annuaires Munichois pour suivre sa trace.
Après la mise en place des tests ADN, le morceau de cuir chevelu [conservé dans un tiroir d'un haut fonctionnaire du Département de la Justice]qui avait été rendu aux autorités Brésiliennes, s'est révélé être une preuve capitale pour établir que le Dr. Mengele avait fui au Brésil et y était mort en 1979 sans jamais être entré aux Etats-Unis. (...)
Un chapitre sur l'échec le plus médiatisé de l'OSI – l'affaire contre John Demanjuk, un ouvrier de l'automobile Américain à la retraite que l'on ait pas parvenu légalement à faire identifier comme le Ivan le Terrible de Treblinka – supprime des dizaines de détails, y compris une décision rendue par la Cour d'appel en 1993 qui a soulevé des accusations de caractère éthique envers certains hauts responsables du Département de la justice.
Cette section omet également un passage révélant que des émigrés Lettons sympathisants avec M.Demanjuk se sont secrètement arrangés pour que la poubelle de l'OSI leur soit livrés chaque jour entre 1985 et 1987. Les émigrés fouillaient les poubelles pour y trouver des documents classifiés qui auraient pu aider M.Demanjuk, qui est actuellement poursuivi dans un procès à Munich, pour des accusations de crimes de guerre.
Mme Feigin, en charge du rapport, a déclaré qu'elle était abasourdie par la tentative du Département de la Justice de conserver secrète une part centrale de son histoire aussi longtemps. « C'est une histoire incroyable qui doit être racontée », a-t-elle déclaré.
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