Les récents déboires de l’UMP nous ont fait connaître de nouveaux éléments de la garde rapprochée de Jean-François Copé : Jérôme Lavrilleux, Geoffroy Didier, ou encore Guillaume Peltier. Des individus qui ne font pas dans la dentelle. La nuit de la rocambolesque élection de Copé, Lavrilleux a intoxiqué les médias en chiffres et en rumeurs sur les fraudes du camp Fillon. Ancien « bébé Hortefeux », Geoffroy Didier a un regard d’aigle et une moue méprisante. Il a lancé la Droite forte, à égalité avec Guillaume Peltier qui, au pouvoir, supprimerait le droit de grève des fonctionnaires.
Je m’intéresserai ici à Michèle Tabarot, femme de ménage – au sens où elle fait LE ménage là où Copé le lui demande. Il se trouve qu’elle est né en 1962 à Alicante, en Espagne. Exactement au même moment, j’ai passé six semaines avec mes parents dans cette ville. En 1962, je suis en classe de 3ème dans un grand lycée lillois. Le recrutement est petit et moyen-bourgeois. En début d’année, la grande majorité des élèves de ma classe est pour l’indépendance de l’Algérie. Quelques semaines après la rentrée, nous accueillons un camarade pied-noir. Fils de commissaire de police. Extrêmement sympathique. Il a été indéniablement traumatisé par un départ brusqué de son pays natal et a beaucoup de mal à s’habituer aux brouillards automnaux du nord de la France. Il surmonte son mal-être par l’humour. On l’adopte sans peine. On sympathise avec lui. Au point qu’en fin d’année nous ne sommes plus que deux, dans la classe, à être en faveur de l’Algérie algérienne tandis que tous les autres ont adopté la cause de l’OAS.
Cette évolution m’avait quelque peu traumatisé. Mais à Alicante, que vis-je ? Des dizaines de « réfugiés politiques » (comme ils se nommaient), membres actifs, activistes, de l’OAS, tous plus ou moins interdits de séjour en France. Parmi ces vaillants : le père de Michèle Tabarot. Avec sa fille copénisée, nous sommes donc en présence d’un certain refoulé national, c’est-à-dire de la réaction colonialiste.
Papa Robert Tabarot était surnommé le “ Rocher ” (Le Pen, c’est le “ Menhir ”). Ancien champion d’Afrique du Nord de boxe, il est le neveu de Pierre Tabarot, propriétaire du journal Oran républicain, plutôt de gauche. Il est l’un des chefs de l’OAS en Oranais. C’est à Oran qu’ont lieu, malgré un accord entre l’OAS et le FLN, les affrontements les plus meurtriers entre Français et Algériens dans les semaines qui précédent les accords d’Évian. Du 22 au 26 juin 1962, Oran brûle. « On ne leur laissera rien », proclament Tabarot et les siens.
Le 27 juin, Tabarot quitte l’Algérie précipitamment et se réfugie à Alicante où il ouvre une pizzeria et où il devient le chef officieux des Pieds-Noirs oranais d’Espagne. À Alicante, la communauté pied-noire a sa propre école privée où la petite Michèle commence sa scolarité. Amnistié en 1968, Tabarot s’installe à Cannes en 1969. Il est élu conseiller municipal et préside la maison du Pied-Noir.
Michèle Tabarot ne rejoint pas le Front national, mais Démocratie libérale, dirigée alors par Alain Madelin, ancien d’Occident. À l’intérieur de l’UDF, ce petit parti accepte les alliances avec le FN. Aux élections de 1998, Soissons (ancien ministre de Giscard, Mitterrand et Rocard), Blanc, Million, Baur sont élus présidents de région avec des voix lepénistes.
À vingt et un ans, Michèle Tabarot est adjointe au maire du Canet. En 2002, elle est élue députée UMP. Elle devient vice-présidente du groupe de travail parlementaire sur les rapatriés.
En février 2005, des enseignants lancent une pétition contre la loi qui les oblige à souligner les aspects positifs de la colonisation. Michèle Tabarot réagit vertement : « Je ne peux accepter que cet hommage à la présence française outre-mer soit aujourd’hui attaqué par une minorité d’enseignants, (…) les mêmes qui nous ont enseigné pendant toutes ces années que les modèles communistes de Moscou, Pékin ou Phnom Penh permettaient à l’être humain de s’épanouir dans une société juste, égalitaire, et dans le respect des droits de l’homme, les mêmes qui, aujourd’hui, désemparés de ne plus pouvoir enseigner leur modèle de démocratie, font quotidiennement à leurs élèves le procès de la colonisation (…). La France coloniale a permis d’éradiquer des épidémies dévastatrices, grâce aux traitements dispensés par les médecins militaires. Les Français d’outre-mer ont permis la fertilisation de terres incultes et marécageuses, la réalisation d’infrastructures que les Algériens utilisent encore aujourd’hui. La France a posé les jalons de la modernité en Algérie, en lui donnant les moyens d’exploiter les richesses naturelles de son sous-sol. »
Le 3 février 2006, le député de la droite dure Lionnel Luca organise à Saint-Laurent-du-Var un rassemblement d’hommage à « l’œuvre colonisatrice des Français d’outre-mer ». Des milliers de pieds-noirs chantent à pleins poumons “ C’est nous les Africains ”. Michèle Tabarot déclare à France 3 : « Faire repentance de quoi ? D’avoir créé 126 hôpitaux, éradiqué des endémies, fertilisé des terres incultes, d’avoir bâti 23 ports et 4 aéroports ? Pieds-noirs et harkis n’ont à faire repentance devant personne. »
Avec Tabarot, Luca, Copé, l’OAS revient au premier plan. L’Algérie française s’affiche « sans tabous » dans un parti qui se réclame du gaullisme.
En politique, tout est possible, y compris la victoire de Copé lors d’une élection présidentielle. Nous sommes prévenus.
Source : Le Grand Soir
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les messages anonymes ne seront pas publier