vendredi 14 août 2015
Le Morvan mon pays de naissance a donné beaucoup de ses enfants dans la lutte pour la liberté/ Dun-les-Places est un des villages martyrs de la Libération de 1944.
Dun-les-Places est un des villages martyrs de la Libération de 1944.
C’est le 26 juin 1944 que le village, 806 habitants dont 120 dans le bourg proprement dit, verra débuter un martyre qui le fera surnommer L'Oradour du Morvan.
Le 24 juin, les villages de Montsauche et Planchez étaient détruits par les allemands. Le 26 en fin d’après-midi, un groupe de membres de la Gestapo et de miliciens arrive dans le village. Dix-huit hommes sont interpellés et conduits devant l'église pour un soi-disant « contrôle de papiers ». Ils seront rejoints par le curé du village. Vers 20 h un nouveau groupe arrive et installe un canon dans le clocher afin de créer une provocation en tirant à blanc sur les troupes qui arrivent. Les hommes sont interrogés dans l'hôtel voisin sur la présence de Maquis dans la région, ils ne diront rien malgré la proximité des Maquis Camille et Bernard. Les femmes et les enfants restés dans leurs maisons sont terrorisés.
À 22 h, alors que l'électricité est coupée et que l'orage se déchaine, éclatent des coups de feu et de canon dans tout le village puis le silence revient. Les allemands brisent les portes et les vitres et envahissent les maisons en poussant des cris. Ils s'y installent vidant les caves du vin et de toute la nourriture qu'ils peuvent y trouver.
Le 27 juin, le village est systématiquement pillé. Les allemands entassent dans leurs camions linge, literie et objets de valeur après avoir abattu porcs, moutons et volaille.
Le 28 juin au matin, les allemands se préparent à partir. À l'aide de lance-flammes, de grenades incendiaires et de bûches, ils mettent le feu aux maisons. À 12 h 30 après avoir fait sonner les cloches, ils partent en chantant et en jouant de l'accordéon. Les survivants découvrent alors l'horreur : les corps des otages sont allongés déchiquetés sous le porche de l'église, celui du curé, partiellement dévêtu, est découvert dans le clocher. D'autres corps sont sur les routes ou dans les hameaux voisins. Le massacre aura fait en tout 27 victimes. Les obsèques seront célébrées le 1er juillet. (Wikipédia)
QUARANTE‑HUIT HEURES D’EPOUVANTE A DUN-LES-PLACE
26 juin 1944 : une date que les Morvandiaux et les Nivernais n’oublieront jamais.
La soldatesque nazie, ivre de fureur, après avoir incendié la veille Montsauche et Planchez, va assouvir sa rage de brute déchaînée sur le bourg de Dun‑les‑Places. Dun‑les‑Places, un pays bien tranquille, bien paisible, à l’ombre de sa merveilleuse petite basilique qui sera bientôt le théâtre d’un affreux massacre et verra son clocher mutilé par les obus.
Au début de l’après‑midi, la nouvelle se répand que les Allemands occupent Saint‑Brisson. Les gens s’affolent et se sauvent ou se préparent à partir en prévision du pire. Tous n’en auront pas le temps. Vers 15 heures les premiers éléments ennemis venant de Montsauche débouchent sur la place. Parmi eux, se trouvent des Cosaques. Autocars, camions, conduites intérieures, motocyclettes pétaradent. Les Boches stoppent et pénètrent dans les maisons, commencent à fouiller celles‑ci pour y chercher les « Terroristes ».
Trois d’entre eux emmènent à l’Hôtel Blandin, le Maire, M. Emery, marchand de vins, et M. Raoul Brichet, instituteur du Pas-de-Calais, réfugié chez ce dernier avec sa femme et ses deux enfants, âgés de 15 et 8 ans. Son petit Jean s’écrie en pleurant : « Ils vont tuer mon papa ». Cependant un officier, très aimable pour la circonstance, examine les cartes d’identité des deux hommes et les relâche. Finalement les soldats qui ont également arrêté, puis relâché M. Châtelain fils et M. Maurice Dirson, de Mézoc‑le‑Froi, et blessé sur le Mont Velin, alors qu’il s’enfuyait, M. Paul Pichot, boulanger (l), repartent en direction de Vermot, premier but de leur expédition. Mais ils ne s’en vont pas seuls. Ils encadrent des chauffeurs de la Société France‑Route, de Paris, MM. Louis Dardenne, 34 ans, Fernand Deregard, 37 ans ; Raymond Marcheron, 24 ans et Jean Sandrini, 35 ans, radiologue, prisonnier libéré, arrivés à Dun depuis quelques jours. Enchaînés durant vingt‑quatre heures dans un pré, ils auront la gorge tranchée le 27 en compagnie de deux jeunes gens : MM. Comméat, macon, et Girard, mécanicien-frigoriste, âgés de 23 et 21 ans.
Vers 17 heures 30, Verts‑de‑Gris et F. F. I. sont aux prises. Des camions tombent dans un piège de mines. La fusillade est nourrie. Comme on l’a vu, elle sera vive jusqu à 20 heures et se prolongera tard dans la nuit. Un Russe ayant violé une fillette de 14 ans et tenté d’abuser d’une jeune femme dont le bébé sera battu, sera, sur l’ordre d’un officier passé par les armes sur un tas de fumier. MM. Grillot et Petit recevront de nombreux coups de crosse. Douze maisons seront incendiées, parmi lesquelles le Château de Vermot, hôpital de la Résistance.
Au Vieux‑Dun, une habitation sera également brûlée. Mais ceci n’est rien, si l’on peut hélas s’exprimer ainsi, à côté de ce qui se déroule à Dun même. Vers 20 heures 30, de nouvelles troupes arrivent de Montsauche. Tous les hommes se trouvant dans le bourg sont rassemblés près du porche de l’église (2).
La pluie se mettant à tomber, Mme Brichet porte un pardessus à son mari, ainsi qu’à M. Marin, domestique chez M. Emery. Elle va se procurer celui de M. Tournois dont la femme questionne un officier : « J’ai déjà perdu mon père à la guerre de 1914. Vous n’allez pas tuer mon mari ? Cynique, l’officier répond : « Nous accomplirons notre devoir ». M. Emery, interrogé, affirme que les habitants se sont toujours bien conduits avec les soldats et qu’il n’y a pas de résistance dans le pays. Il est autorisé à rentrer chez lui.
Des Allemands sont montés au premier étage de sa maison et ont relevé les stores des fenêtres. Dans quel but ? Leur intelligence en matière de crimes est fertile. Ils vont tout simplement jouer une terrible comédie pour faire valider leur conduite. Une bataille entre soi‑disant maquisards et la Wehrmacht va se livrer au coeur du pays. En fait, cet engagement est monté de toutes pièces, de connivence avec d’autres troupes qui apparais sent par la route de Saulieu.
Subitement, le combat éclate, des coups de canon sont tirés. Instants tragiques. M. Emery, sa femme, Mme Brichet et ses deux enfants qui prient, sont descendus à la cave avec Mme Marin et son fils, âgé de sept ans, et attendent, avec angoisse, comme les autres gens du bourgs la suite des événements. Combien les Boches sont‑ils maintenant ? Peut-être deux mille. Ils fourmillent partout, terminant leurs opérations de pointage des hommes, conduits l’un après l’autre vers le lien de leur exécution, sous le prétexte de vérifier leurs papiers.
Les coups de feu ayant cessé, Mme Brichet remonte pour se rendre compte de la situation. Un soldat, s’exprimant dans un français très correct — sans doute un milicien — l’arrête. — Où allez‑vous, Madame ? — Je vais voir ce qui se passe, nous sommes terrifiés. Que se passe‑t‑il ? — Il y a, Madame, que la Résistance a installé un canon dans le clocher et qu’il tire sur nous. C’est du joli. Vous le saviez, Madame, et votre curé aussi. Il le bénissait tous les jours, il l’a encore béni ce matin en disant sa messe. Mais vous ; allez voir ce que cela va vous coûter. J’ai déjeuné à Dun aujourd’hui et c’est moi qui ai découvert le camp de Vermot.
M. Emery déclare : — Ce n’est pas vrai, j’en donnerais ma tête à couper. Il n’y avait aucun canon dans le clocher à votre arrivée. A peine a‑t‑il parlé qu’on demande le Maire. Il est environ 22 heures 30. De nouveau, on entend des coups de feu. Les minutes s’écoulent, semblables à des siècles...
Puis des soldats s’approchent de la maison de M. Emery pour la réquisitionner. Un officier annonce à Mme Brichet qu’il y a « dix‑sept ou dix‑huit terroristes tués sous le porche de l’église. Vous les verrez demain matin lorsqu’il fera jour ». Et il ajoute : « C’est la guerre ».
Voilà la mentalité des représentants de la « Grande Allemagne », de cette race qui se prétendait « supérieure », et qui l’est, en réalité, en cruauté. Quelle affreuse révélation ! Il est impossible d’avoir une idée des souffrances morales des malheureuses mères et épouses. C’est un atroce martyre que de savoir qu’on ne reverra plus jamais l’être qui est cher, et ceci par la volonté d’un sanguinaire ennemi. Ce douloureux calvaire n’est toutefois pas terminé.
Le 27, les Allemands qui ont recouvert les corps de paille et de genêts, certainement dans l’intention de les brûler, interdisent formellement de sortir des maisons. Mme Emery, ses compagnes et leurs enfants qui ont passé le reste de la nuit dans la cave de M. Régnier sont transférés chez Mme Charpiot, à la Mairie, où des mitrailleuses sont braquées, prêtes à tirer. A la fin de la soirée, Mme Emery demande à un sous‑officier l’autorisation d’aller traire ses vaches avec Mme Marin, ce qui lui est accordé. Mais la besogne est déjà presque achevée par les Allemands qui se sont occupés de panser les bêtes.
La nuit du 27 au 28 semble devoir être éternelle. Qui sait quels projets ont ces monstres ? Ils laissent entendre à leurs prisonnières qu’une autre bataille est possible et qu’il est préférable de se coucher par terre. Le 28, vers 7 heures 30, les soldats qui, enfin, s’en vont, incendient une à une plusieurs maisons de Mésoc‑de‑Froi (Dizien, Renon, Tardy) et de Dun (Coppin, Emery, Roumier, Tournois, Véronnet...).
L’école des filles et la demeure de M. Treillard, forgeron, ont le même sort. Certains Boches chantent, accompagnés par un accordéon et un harmonica. C’est, pour eux, un feu de joie. Naturellement toute la journée de la veille a été employée par ces incendiaires à déménager pour leur profit une grande partie des meubles, à rafler des bijoux, de l’argenterie, des vêtements, du linge, des provisions, du vin, etc... Ils ne s’en retournent pas les mains vides. Les foudres de M. Emery ont été l’objet d’un soin particulier de leur part. Comme ils n’ont pu tout boire ni tout emmener... ils les ont vidés en y pratiquant des trous.
Plusieurs personnes dont la femme de M. Véronnet, malade, ayant pensé à mettre en sauvegarde leurs économies en les portant sur elles, ont été dévalisées. Rien qu’à la Mairie, les Allemands se sont emparés de près de onze mille francs dont sept mille volés dans le sac à main de Mme Charpiot. Ce sac à main était suspecté de servir de cachette à un revolver. Tandis que les miliciens participaient à la dernière partie des représailles, ils ont déclaré à Mme Chopard et à Mme Pichot : « Nous allons vous quitter et les Boches vont aussi vous débarrasser ». Un Allemand « compatissant » a prodigué ses caresses à l’un des quatre enfants de Mme René Blandin en déplorant la mort de son papa : « Tu ne l’auras plus, mon pauvre petit », lui a‑t‑il dit en tapotant ses joues…
Telle fut la fin d’un horrible drame que la Wehrmacht, qui festoya et sabla le champagne, commit de sang‑froid. Vingt et un morts pour le bourg seulement, tel en est le triste bilan :
Messieurs,
Anatole Emery, 63 ans, né le 22 9‑1880, à Gouloux (Nièvre), Maire de Dun‑les‑Places.
André Charpiot, 46 ans, né le 11‑12 1897, à Saint‑Ouen (Seine), instituteur, secrétaire de mairie, ex‑prisonnier de l’Oflag XVII A, libéré en 1941, titulaire de deux croix de guerre.
Raoul Brichet, 34 ans, né le 19‑2‑1910, à Waben (Pas‑de Calais), réfugié, provisoirement instituteur à Bornoux, commune de Dun‑les‑Places.
Henri Bachelin, 47 ans, né le 6‑2‑1897, à Dun-les‑Places, et son fils, Albert, 20 ans, cultivateur. Raymond Balloux, 39 ans, né le 14‑5‑1905, à Paris, épicier.
René Blandin, 39 ans, né le 24‑10‑1904, à Dun-les‑Places, cantonnier Modeste Castellvi, 29 ans, né le 28 5‑1915, à Serra de Almos (Espagne), bûcheron.
Marcel Philippe Delavault, S3 ans, né le 264 191L à Paris, cultivateur.
Jean Dirson, 46 ans, né le 13‑1‑1898, à Paris, cultivateur.
Eugène Friche, 27 ans, né le 24‑12‑1916 à Bobigny (Seine), domestique agricole.
René Jeand’heur5 43 ans, né le 17‑3‑1901, à Brunswick (Allemagne), interprète résidant à Quarré‑les‑Tombes.
Nicolas Leprun, 45 anse né le 25‑11‑1898, à Dunles‑Places, employé de commerce.
Paul Marin, 41 ans, né le 17‑12‑1902, à Paris, domestique agricole.
Bernard Pelmann, 38 ans, né le 18‑10‑1905, à Paris, bûcheron, fusillé dans un pré le matin du 27 juin.
André Sampic, 63 ans, né le 14‑12‑1875, à Eletot (Seine‑Inférieure), professeur d’anglais honoraire au Collège de Joigny (Yonne).
Léon Tournois, 40 ans, né le 30-10‑1903, à Ouroux (Nièvre), hôtelier.
Joseph Candeli, 45 ans, maçon.
Quant à M. l’Abbé Roland, 38 ans, né le 23‑5-1906, à Saint‑Père (Nièvre), il expira après d’affreuses tortures. Les Allemands le conduisirent au clocher où ils avaient monté une mitrailleuse. Ils le flagellèrent avec une lanière de cuir terminée par une boule de porcelaine et l’achevèrent à coups de revolver (3).
Toutes les victimes furent dépossédées de ce qu’elles avaient de plus précieux. Cinq corps furent trouvés à gauche du porche de l’église, neuf sous le porche, trois sur la place et un sur la route de Saulieu (celui de M. Raoul Brichet qui fut tué en tentant de se sauver, juste au moment où il sautait le petit mur entourant la place) . Quelques‑uns avaient été férocement mutilés. La porte de l’église, criblée de balles, était couverte de lambeaux de chair et de cervelle et toute rouge de sang.
Qui fut l’instigateur de ces actes de barbarie ? Un certain Docteur Daubner — Wolf de son vrai nom — venu s’installer à Dun‑les‑Places. Se prétendant anti‑allemand et sujet tchécoslovaque, il s’adonna à l’espionnage. Il fit notamment arrêter, puis libérer, M. Marcel Blandin qui, emprisonné un mois à Auxerre. fut de tous les hommes arrêtés le 26 juin, le seul qui parvint à s’enfuir.
Un fait est sûr : les Allemands étaient possesseurs de plans manuscrits du bourg ainsi que l’ont constaté Mesdames Pichet et Tournois. Et, sur ces plans, du crayon rouge avait été utilisé pour signaler plus spécialement quelques maisons.
Le Docteur Daubner est parti de Dun avant le jour fatal. D’où les Allemands sont‑ils venus ? Une partie de leurs convois était composée de véhicules des départements de la Saône‑et‑Loire, du Jura et de la Côte‑d’Or. On a su par M. Gollotte (Français, chauffeur d’autobus réquisitionné), que les hommes qu’il transportait avaient été chargés à Dijon derrière la prison. L’une des colonnes, commandée par le Lieutenant Werfürth, droguiste à Rosenberg (Allemagne), fusilla lors de son passage sur la commune de Chissey.en‑Morvan, un réfugié du Pas‑de‑Calais, Daniel Chubin, 15 ans, domicilié à Ménessaire et deux jeunes gens d’Alligny‑en.Morvan, Roger Fleck, 16 ans et André Charles, 18 ans. Ces derniers se rendaient à bicyclette auprès d’un camarade hospitalisé à Autun à la suite d’un accident d’automobile. Ils furent tous tués par plusieurs décharges de mitraillette près du hameau de Vauchezeuil.
(1) M. Brisquet fut aussi atteint en s’échappant du village des Bourdeaux. (2) Sauf quelques personnes : d’une part, M. Regnier épicier qui, âgé de 69 ans, se fit passer pour en avoir 75, M. Choureau, 50 ans et un octogénaire, M. Auguste Blandin ; et d’autre part, M. Autixier qui put se cacher. (3) A sa mère, ils déclarèrent : « On l’a tué ton bandit de curé ».
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