Ivry, le 9 octobre 2009
M. Nicolas SARKOZY
Président de la République
Palais de l'Elysée
55, rue du faubourg Saint-Honoré
75008 Paris
Monsieur le Président de la République,
Je reprends la plume pour vous intervenir de nouveau auprès de vous au sujet de notre jeune
compatriote, Salah Hamouri, qui est sur la planète le seul Français en prison depuis plus de 4
ans pour des raisons uniquement politiques.
Je ne reprends pas la genèse de cette affaire. J’en reste aujourd’hui à ce qui me semble le plus
signifiant.
Vous avez récemment écrit au premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, pour lui
demander, selon les éléments publiés dans la presse, un geste de « clémence » à l’occasion de
l’examen de sa « remise de peine » qui a été froidement et sèchement refusée par la
Commission israélienne ad hoc qui a considéré que Salah Hamouri était un élément
« dangereux ». Cela parce qu’il n’avait pas – crime suprême – changé d’opinion quant à son
refus de l’occupation israélienne et qu’il n’entendait pas présenter d’excuses parce qu’il
refuse de l’accepter.
En d’autres termes on lui reproche de ne pas dire : « Je m’excuse de ne pas accepter
l’occupation israélienne de Jérusalem-Est et de la Cisjordanie ».
Pour nous Français, qui sommes porteurs d’une histoire lourde et riche à la fois, on admettra
que c’est bien plutôt à son honneur que de refuser de plier genou face à l’injustice dont est
victime « son » pays qui n’existe toujours pas malgré le droit international dont vous avez
récemment rappelé les termes, notamment la création d’un Etat palestinien sur la base de
l’ensemble des résolutions pertinentes de l’ONU.
Reste que face à la réaction négative du premier ministre israélien, du moins publiquement et
à ce que nous pouvons en savoir, vous n’avez formulé aucune remarque, ce qui est un cas
d’école unique venant de vous. Dans le même temps, afin d’imaginer la suite à donner, on
aurait pu attendre ou imaginer que vous rencontriez la mère de Salah, Madame Denise
Hamouri. Cela n’a pas été le cas. Et depuis plus de 4 ans que son fils est en prison, vous
n’avez jamais daigné la recevoir.
Dans le même temps, s’agissant de notre autre jeune compatriote, Guilad Shalit, caporal de
l’armée israélienne en situation très difficile puisque kidnappé, vous multipliez les démarches
et les déclarations tandis que ses parents, spécialement son père, ont été reçus plusieurs fois
par vous en personne.
Suite à la vidéo récente indiquant qu’il était bien vivant, et nonobstant le fait juridique
concernant la situation des Français engagés dans une guerre dont leur pays n’est pas partie
prenante, vous avez de nouveau appelé à sa libération pure et simple, ce que nous souhaitons
avec vous.
Mais dire que vous avez opéré une nette différence dans le traitement des deux cas n’est pas
excessif. Et cette différence est choquante qui mobilise du même coup de larges secteurs de
l’opinion publique française, toutes tendances politiques confondues car il s’agit de la cause
des droits de l’homme.
D’un côté un franco-israélien capturé en uniforme les armes à la main, d’un autre côté un
Français qui n’a rien fait et certainement pas utilisé la moindre arme contre quiconque. Pour
l’un vous demandez la libération tandis que pour l’autre rien de tel n’est exigé par vous. D’un
côté vous recevez, encore tout récemment la famille, de l’autre vous vous y refusez. Ce n’est
pas mauvaise polémique que d’affirmez que vous pratiquez sur ces deux cas un « deux poids,
deux mesures » que rien ne peut justifier.
Tandis que l’on évoque aujourd’hui une possible libération du jeune soldat Guilad Shalit en
échange de prisonniers palestiniens, je ne vois pas que le cas de notre compatriote Salah
Hamouri puisse être oublié ou négligé dans ce qui apparaît comme un scénario porteur
d’espoir de libération notre compatriote franco-israélien. Considérés comme étant « très
dangereux » par Israël de nombreux prisonniers palestiniens seront libérés. Et je ne vois pas,
non plus, que la mère de Salah Hamouri puisse être considérée comme persona non grata à
l’Elysée, je veux dire dans votre bureau.
Cette lettre pour vous demander d’agir utilement et pour l’un et pour l’autre. Pour vous dire
aussi que la liberté de l’un n’est pas moins importante que la libération de l’autre. Ce sont
deux jeunes qui doivent pouvoir vivre libres, enfin libres, et goûter de nouveau l’air de la vie.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, à notre attention vigilante et
à notre respect.
Jean-Claude Lefort
Député honoraire
Coordinateur du
Comité national de soutien
à Salah Hamouri
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