Il y a quinze ans ans, avant la première victoire bolivarienne aux présidentielles, le champ politique se caractérisait par un apartheid de fait. Une partie de la classe moyenne et de l’élite locales, minoritaires, rêvaient (et rêvent encore parfois) d’exterminer une myriade d’insectes grouillant dans les cerros, dans les barrios surplombant Caracas. Cette majorité sociale occupe aujourd’hui le centre de l’espace politique et, vote après vote, accélère le temps historique. Cette intensité génère de nouveaux problèmes à résoudre.
Jesse Chacón, ex-ministre et directeur de la fondation de recherches sociales GISXXI, pointe ainsi le retard de la forme politique sur l’électorat populaire en notant “la fragilité du Parti Socialiste Unifié du Venezuela (PSUV, principal parti bolivarien) qui n’a pas réussi à se muer en “intellectuel collectif » (Gramsci), en parti capable de s’articuler territorialement et socialement avec les gens et de prendre la tête de la mobilisation. Au contraire cette fraction révolutionnaire maintient une trame interne trop complexe pour mener des processus d’organisation solides et permanents. Sa manière répétée de ne s’activer qu’en fonction des élections sans être présent dans la bataille autour des problèmes quotidiens des gens, le cantonne à n’être qu’un espace symbolique que le peuple identifie conme le parti de Chavez et auquel, comme tel, il donne son vote. Reste à penser comment construire un vrai détachement collectif capable de conduire la société vénézuélienne dans une transition difficile et ardue vers le socialisme. » (2)
L’autre révolution, c’est la renaissance de l’Etat et la multiplication de services publics de grande envergure. Il ne s’agit pas d’un simple refinancement, d’une simple « sortie du néo-libéralisme » mais de construire un nouveau type d’État. Prenons l’exemple de la Mission Logement. (3)
Avant la révolution bolivarienne, les quartiers populaires aux toits de carton et de zinc dépeints par la chanson « Techos de cartón » d’Ali Primera en 1974, n’étaient que l’expression la plus visible du drame de la pauvreté et de l’exclusion sociale. En faisant résonner le mot car-tón, Ali Primera disait la condition réelle d’une population sans État, sans défense face aux éléments, livrée à l’exploitation quotidienne. (4)
¡Qué triste, se oye la lluvia en los techos de cartón ! ¡Qué triste vive mi gente en las casas de cartón ! Viene bajando el obrero casi arrastrando los pasos por el peso del sufrir mira que es mucho el sufrir ! ¡ mira que pesa el sufrir ! Arriba, deja la mujer preñada abajo está la ciudad y se pierde en su maraña hoy es lo mismo que ayer : es su vida sin mañana Recitado « Ahí cae la lluvia, viene, viene el sufrimiento pero si la lluvia pasa ¿ cuándo pasa el sufrimiento ? ¿ cuándo viene la esperanza ? » Niños color de mi tierra con sus mismas cicatrices millonarios de lombrices Y, por eso : ¡ Qué tristes viven los niños en las casas de cartón ! ¡ Qué alegres viven los perros en casa del explotador ! Usted no lo va a creer pero hay escuelas de perros y les dan educación pa’ que no muerdan los diarios, pero el patrón, hace años, muchos años que está mordiendo al obrero oh, oh, uhum, uhum ¡ Qué triste se oye la lluvia en las casas de cartón ! ¡ qué lejos pasa la esperanza en los techos de cartón ! | Comme elle est triste la pluie qu’on entend sur les toits de carton ! Comme elle est triste la vie de mon peuple dans les maisons de carton ! L’ouvrier arrive d’un pas traînant sous le poids de sa souffrance. Regarde comme il souffre ! Regarde comme la souffrance lui pèse ! En haut il laisse sa femme enceinte, en bas il y a la ville et il se perd dans son maquis aujourd’hui pareil qu’hier : c’est sa vie sans lendemain. Récité Là-bas tombe la pluie, elle vient, elle vient la souffrance. Mais, si la pluie cesse, quand la souffrance cessera-t-elle ? Quand viendra l’espoir ? Enfants de la couleur de mon pays, comme lui, pleins de cicatrices, millionnaires en parasites. C’est pourquoi : Qu’elle est triste la vie des enfants dans les maisons de carton ! Qu’elle est gaie la vie des chiens dans la maison de l’exploiteur ! Vous n’allez pas me croire mais il existe des écoles pour chiens où on les éduque pour qu’ils ne mordent pas les journaux. Mais le patron, depuis de très longues années, ne cesse de mordre l’ouvrier. Oh, oh, mmm, mmm Qu’elle est triste la pluie qu’on entend dans les maisons de carton ! L’espoir, comme il passe loin des toits de carton ! |
Dans des pays comme l’Espagne, la disparition progressive de l’État social a eu pour conséquence durant les quatre dernières années 350.000 saisies hypothécaires. Le bilan pour 2012 est de 18.668 expulsions, soit une hausse de 13,4% par rapport au deuxième trimestre de 2011. 34% des suicides, selon les statistiques officielles, sont dus à des expulsions.
À Caracas, Yana Coelli est formatrice populaire dans le secteur El Recreo. Elle se charge d’organiser les processus de formation et d’organisation communale. Un des problèmes qu’elle affronte avec les quasi 200 personnes des huit conseils comunaux de la commune en construction de sa juridiction, est précisément celui du logement.
« Nous avons commencé le 7 juin 2012 par des réunions d’orientation pour former les assemblées citoyennes techniques sur le logement. Lors des deux premières réunions nous avons utilisé la méthodologie de « l’arbre du problème » pour détecter ensemble les causes profondes du manque de logements, comprendre pourquoi nous étions obligés de louer ou d’être acculés dans des terrains à haut risque. Le but était que tous voient que ce besoin ne se réduit pas à nous seulement mais qu’il est vécu à l’échelle nationale. Nous avons dû remonter l’histoire du pays, les quarante ans de fausses promesses des gouvernements de la quatrième république, l’éléphant blanc d’Inavi (Institut National du Logement). Les gens ont beaucoup participé, un climat de confiance s’est noué. Après les élections nous avons repris les réunions, à chacune d’elles ont assisté en moyenne une centaine de personnes.
Pour Yana, la participation est fondamentale, mais plus encore la formation. Pour elle, seuls des conseils comunaux organisés, menant les recensements de logement et proposant des solutions élaborées collectivement, garantissent l’accès à un logement digne, qu’ils soient construits par le biais de la Grande Mission Logement ou en auto-construction avec la collaboration des Comités de Terre Urbaine ou du « Movimiento de Pobladores » qui se chargent de chercher les terrains ou les immeubles abandonnés afin de les destiner au logement.
« Les occupants des refuges sont prioritaires mais il y a beaucoup plus de gens qui ont besoin de logements, et qui doivent s’organiser pour transférer aux institutions gouvernementales l’information exacte sur leurs besoins. La Mission Logement devrait travailler davantage avec les conseils communaux, et qu’on le voie à la télévision, pour stimuler l’organisation citoyenne. La communauté qui ne s’organise pas n’obtiendra rien. C’est ainsi que va notre processus : essais, erreurs, essais, tout le temps » …
Thierry Deronne.
17 décembre 2012, Venezuela Infos. http://venezuelainfos.wordpress.com/2012/12/17/quand-seloign...
Avec Mariel Carrillo, AVN
http://www.avn.info.ve/contenido/vivienda-y-revoluci%C3%B3n-... et http://www.ciudadccs.info/?p=363025
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