Devinette : dans quelle cité française policiers et juges n'ont-ils plus le droit d'entrer ? Réponse : non, il ne s'agit pas des 4000 ou des Tarterêts, mais de l'Élysée...
La Cour d'appel de Paris en a décidé ainsi. Dès lors que tout ce qui se trame à l'Elysée peut avoir été commandité par le président himself, plus aucune enquête n'est permise. Le cas portait sur l'affaire des sondages de l'Elysée : en 2008, le Château (qui n'a jamais aussi bien porté son nom) avait eu recours aux très chers services de la société Publifact études, dirigée par Patrick Buisson, un proche de Sarkozy, sans passer par la case "appel d'offres" alors que la loi l'y contraignait (190 sondages réalisés pour la modique somme de 3,3 millions d'euros - dont 1,5 million pour la seule Publifact, un prix d'ami...). Un délit de favoritisme levéen 2008 par la Cour des comptes.
Président à responsabilité limitée
La cour d'appel a donc estimé (voir l'arrêt publié sur le site de rue89 ) que l'immunité juridique du président de la République s'appliquait aussi à toute personne qui pourrait agir en son nom. Problème : pour savoir si une personne agit au nom du président, il faut enquêter. Et c'est justement cette enquête qu'a refusé d'ouvrir la Cour d'appel, au motif que cela "conduirait à exercer une action ou à réaliser des actes d'information pouvant mettre en cause la responsabilité du chef de l'Etat". De fait, toute enquête concernant une personne travaillant au service de l'Elysée est interdite. Circulez...
La République irresponsable
Pire, la décision de la Cour immunise aussi de fait toutes les entreprises en relation commerciale avec l'Elysée. Champagne ! Voire, encore pire : pourquoi ne pas imaginer que de simples proches de Sarkozy, non employés par l'Elysée, puissent bénéficier de ce bouclier juridique ? L'argument a déjà été utilisé... par l'Elysée, pour justifier que Dâme Cécilia sèche une séance de questions/réponses devant la commission parlementaire chargée d'enquêter sur la libération des infirmières bulgares... Il suffira bientôt de toucher la main de l'Élu pour voir tous ses ennuis judiciaires s'évaporer !
On n'arrête pas le progrès (mais le procès)
L'association Anticor a décidé de se pourvoir en Cassation, en dernier recours. Et le Sénat pourrait ouvrir une enquête parlementaire. Il n'en reste pas moins que cette décision de la Cour d'appel est une première. On se rappelle que, dans l'affaire des écoutes de l'Elysée, alors que François Mitterrand était encore Président de la République, son ancien directeur de cabinet et plusieurs autres de ses "collaborateurs" avaient bel et bien été mis en examen. Et, en 2001, la Cour de cassation avait jugé que si "l'action publique à l'encontre d'un Président de la République (...) pendant la durée du mandat présidentiel" est exclue, "les juges d'instruction restent néanmoins compétents pour instruire les faits à l'égard de toute autre personne, auteur ou complice". Mais c'était une autre époque... Les voies de l'Élysée sont dorénavant... insondables !
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