Les enfants volés du franquisme
Les enfants volés du franquisme
Reportage : Sandrine Mercier, Joseph Gordillo (ARTE Info, 22.11.2009)
Paola est sans doute l'une des dernières victimes d'un impensable trafic d'enfants. Née en Espagne, en 1975, à la fin de la dictature franquiste, elle aurait été volée à sa mère, pour être adoptée par une autre famille. Aujourd'hui, elle ne trouve aucune trace de son passé: "C'est sur que l'on nous cache quelque chose..quoi ? Je ne sais pas exactement, mais si toutes les portes se ferment à chaque fois, cela prouve bien qu'il y a quelque chose à cacher."
Les enfants volés restent aujourdhui encore, un des grands secrets de l'Histoire espagnole. Tout commence en 1939, en pleine guerre civile. Des milliers de femmes républicaines viennent accoucher dans les maternités et ressortent sans bébés. Tous, sont déclarés morts nés. En fait, l'enfant, bien vivant, est placé sous la tutelle d'une famille proche du régime franquiste, pour être rééduqué.
Ce sont les religieuses qui sont chargées de voler les enfants, elles utilisaient leur influence et l'autorité de l'Eglise pour faire taire les plaintes des mères. C'étaient elles aussi qui venaient annoncer « votre enfant est mort ».
Parfois le vol pouvait être encore plus simple, en dérobant les enfants dans les prisons. Trinidad fut détenue politique en 1939 et se souvient d'étranges disparitions: "On ne recensait pas les enfants en prison. J'en ai vu beaucoup qui, à l'âge de trois ans, étaient libérés par la direction, mais si personne ne venaient les chercher, et bien : c'était adieu !"
30 000 enfants auraient ainsi été enlevés aux familles républicaines. Fernando est l'avocat de plusieurs d'entres elles, il vient aujourd'hui déposer plainte devant le tribunal. 70 ans après, le scandale n'a toujours pas été dénoncé: "Nous essayons de prouver que c'était une action à grande échelle, une action préméditée, qui prend racine dans l'idéologie franquiste."
Une majorité des preuves ont été effacées. Les actes de naissance ont été falsifiés ou brûlés, comme celui de Paola. Le trafic bien rôdé s'est prolongé même après la mort du dictateur Franco, devenant un simple commerce de bébés. Les enfants volés pourraient être ainsi, bien plus nombreux que 30 000.
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