Jeudi 31 mars. 21H20. C'est à Deauville, à la fin mai, que sera évoquée au niveau international et des chefs d'état du G8 eux-mêmes, la question de la "sûreté nucléaire". A Tokyo, Nicolas Sarkozy a en effet d'emblée planté le décor : on peut parler "sûreté" mais sûrement pas "abandon du nucléaire". L'Allemagne fera-t-elle entendre une autre petite musique ?
Aujourd’hui, après l’annonce d’une contamination grave d’une nappe phréatique à 15 m de profondeur sous la centrale, la journée nous inspire surtout deux choses :
La première entre en résonance avec un commentaire posté l’autre jour sur ce blog par un lecteur- internaute (que je remercie). Il s’y présentait comme un ancien du plateau d’Albion ou plus précisément, un « Contrôleur militaire des protocoles d'assemblages des armes nucléaires au Plateau d'Albion de 1979 à 1986, base aérienne 200, 1er Groupement de Missiles Stratégiques. » Il y évoquait certain scénario « politiquement incorrect » de la catastrophe de Fukushima qui, selon lui, (ne pouvait) « être convenablement géré que par des techniciens et des ingénieurs militaires et de la sécurité civile, totalement indépendants des organismes privés car il relève d'un contexte similaire à celui desconséquences d'un conflit nucléaire. »
Je suppose que notre lecteur ne sera donc pas étonné d’apprendre, selon une l’agence Kyodo news que « quelque 140 spécialistes militaires américains en radiations nucléaires vont être prochainement dépêchés au Japon pour aider les Japonais à enrayer la crise dans la centrale atomique accidentée de Fukushima ». Les Forces d’autodéfense japonaises (l’armée nippone) sont déjà intervenues à des moments cruciaux (quand il fallait, par hélicoptère, remplir les piscines contenant des combustibles usagés à ne pas mettre à l’air (1). Preuve qu’avec l’accident nucléaire, par nature ( ?) - comme le suggéraient les physiciens cités dans notre blog avant-hier (2) il faut… reprendre des réflexes militaires. Secret, obéissance, sacrifice... robotisation (?). Une certaine idée de l’ordre s’impose aux portes d’une centrale. Voire autour, comme dans la « zone d’exclusion » (le demi-cercle de 20 km de rayon autour de la centrale que les habitants ont dû quitter).
Cette zone est apparue comme plus sinistre encore ces dernières heures, après l’annonce par la police de la présence des corps de 1000 personnes décédées et laissées là, en l’état, après le tremblement de terre et le tsunami. Leurs dépouilles mortelles n’ont pas été sorties de la zone – par peur des radiations. Et maintenant, sinistre retour des choses, ce sont ces pauvres corps eux-mêmes qui seraient dangereux, vu les doses reçues ? On pense à ces enterrements qui eurent lieu après la catastrophe de Tchernobyl, où du plomb et du granit furent empilés sur des tombes, afin d’éviter que les morts, chargés en radioactivité, n’irradient les vivants. On voudrait inventer une métaphore plus mortifère qu’on n’y parviendrait pas.
Notre deuxième pensée va à ceux qui, doucement, dans l’archipel s’interrogent et s’inquiètent – même pour nous ! Une traductrice, avec laquelle nous avions travaillé il y a trois ans, exactement à la même époque, nous a ainsi écrit ce mail depuis Tokyo que nous avons eu envie de reproduire tel, et dont nous la remercions :
« Tous les jours, jour et nuit, à la TV, à la radio, dans les journaux,
on parle des centrales nucléaires FUKUSHIMA.
Les spécialistes de ce domaine nous donnent les nouvelles de l'état actuel
en détail, tout le temps et toute la journée.
Mais, franchement parlant, je voudrais savoir simplement, quand on peut
arrêter complètement ce problème.Je pense que presque tous les Japonais souhaitent la même chose que moi.
J'habite à plus de 200 km de ces centrales FUKUSHIMA.
Tous les jours, on nous donne le degré de la pollution atmosphérique.
Par exemple, dans la région où j'habite, hier c'était 0,079 micro sievert
qui est 0,044 d'habitude. Et avant-hier, c'était 0,083.
Ce que je crains, c’est que l'accident de ces centrales donne le dégât
terrible non seulement aux êtres humains mais à tout ce qui existe dans ce globe.
Je suis accablée de vous donner tant de souci.
Moi, je vis presque normalement, s'il n'y a pas la panne d'électricité programmée.Les cerisiers viennent de commencer à fleurir.Les fauvettes annoncent l'arrivée du printemps.
Il fait beau et il fait doux.
Je vous exprime ma gratitude très profonde pour votre sollicitude. »
http://sciencepourvousetmoi.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/03/29/fukushima-suite22-inquietudes-de-physiciens-asiatiques.html
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