Cancun, Mexique, 8 décembre 2010.
mardi 14 décembre 2010
Discours du Ministre des Relations Extérieures de la République de Cuba, Bruno Rodriguez Parrilla,au sommet de Cancun
Cancun, Mexique, 8 décembre 2010.
Monsieur le Président,
Eminents chefs d’Etat et de Gouvernement,
Eminents délégués,
De puissantes intérêts assurent sans trembler que le changement climatique n’existe pas, qu’il est inutile de s’en préoccuper et que le problème sérieux pour lequel nous sommes
réunis aujourd’hui, n’est qu’une invention. Ce sont ceux qui aujourd’hui, au Congrès des Etats-Unis d’Amérique, s’opposent à la ratification des faibles instruments qui contrôlent la prolifération des armes nucléaires, en une croisade insensée dont l’unique but consiste à récupérer la petite partie de pouvoir qu’ils ont perdue il y a à peine deux ans.
Ce sont ceux qui veulent réduire de 10% les impôts de la population qui contrôle 90% de la richesse, les mêmes qui s’opposent à la réforme du système de santé, de l’assurance chômage, et à n’importe quelle proposition qui représente un petit pas vers le progrès ou l’équité.
Ce qui est certain, et nous le savons bien, nous qui sommes réunis ici, c’est que le changement climatique s’ajoutant à la menace sérieuse d’une conflagration nucléaire, constituent les dangers les plus graves et les plus proches que l’humanité affronte pour sa survie.
L’absence de progrès vers une solution réelle concernant ces deux problèmes répond à l’attitude irresponsable de ceux qui provoquent et tirent bénéfice du gaspillage, des catastrophes, des guerres et de la tragédie que vivent nos peuples.
C’est le devoir de tous de demander à ceux qui en ont la responsabilité historique, que cesse le gaspillage et la consommation irrationnelle des ressources limitées de notre planète et que les millions qui aujourd’hui, sont utilisés pour faire la guerre, soient destinés à promouvoir la paix et le développement soutenable de tous les peuples.
Voilà un an, à Copenhague, la 15° Conférence du Sommet sur les Changements Climatiques n’a pas réussi à répondre à l’attente mondiale d’un accord global qui affronte de manière juste et efficace le changement climatique.
Il y eut un manque total de transparence et des procédures antidémocratiques. Un groupe de pays conduit par les Etats-Unis, le plus grand pollueur historique par tête, prit en otage le processus de négociation et imposa un document apocryphe qui ne résout aucun des défis proposés par les recherches scientifiques les plus conservatrices sur ce thème.
Copenhague fut un désastre.
Ensuite, les Etats-Unis et l’Union Européenne se lancèrent dans une campagne depressions politiques, financières et d’obtention de l’Aide Officielle au Développement souscondition, pour essayer de légitimer l’inexistant « Accord de Copenhague ».
Les documents nord-américains classés récemment dévoilés sont particulièrement intéressants, en particulier celui enregistré sous le N° 249 182, 10 Brussels 183, du 17 février 2010 qui se rapporte à des actions - je cite – pour « neutraliser, coopter ou marginaliser » un groupe d’Etats parmi lesquels est mentionné Cuba. J’ai ici ce document, et d’autres, à ma disposition, qui démontrent la perfide diplomatie des puissances en ce qui concerne le changement climatique.
Monsieur le Président :
Le changement climatique est une menace globale qui demande des solutions globales qui soient justes, équitables et équilibrées et qui concernent tous les pays du monde. C’est pour cela que nous adoptons, après un effort important, la Convention Marco et son Protocole de Kyoto et pour cela, ses principes cardinaux sont aujourd’hui aussi valides que lorsque nous les avons mis sur pied.
Il est de notoriété publique que la cause principale de l’altération du système climatique mondial est due au modèle de production et de consommation insoutenables qui prévalent dans les pays développés. On reconnaît aussi que le principe des responsabilités communes mais différenciées et les capacités respectives des Etats constituent la pierre angulaire d’une solution juste et durable.
Nous, les pays du Sud, ne sommes pas responsables de l’absence d’accord pour freiner le changement climatique. Nous sommes davantage les victimes de l’absence de progrès et des attitudes égoïstes de ceux qui jouissent déjà de la surexploitation des ressources de la planète qui s’épuisent. Les petites îles, encore plus vulnérables, méritent une considération et un traitement spécial.
La Conférence Mondiale des Peuples sur les Changements Climatiques et les Droits de la Terre Mère qui eut lieu en mai dernier à Cochabamba, posa les problèmes essentiels qui doivent être pris en compte.
Monsieur le Président :
Un accord à long terme doit garantir une perspective de développement soutenable pour les pays du Tiers-Monde et non une restriction écrasante de plus pour y arriver. Ceci implique que leurs émissions de gaz à effet de serre doivent croître inévitablement pour satisfaire les besoins de leur développement économique et social. La Convention Marco le dit et les pays développés doivent l’accepter.
Dans le cadre d’une seconde période d’engagement dans le Protocole de Kyoto, les pays industrialisés doivent assumer des obligations contraignantes, quantifiables et plus ambitieuses, de réduction de leurs émissions.
Il est nécessaire d’adopter maintenant, ici, à Cancun, des décisions concrètes sur une seconde période d’engagement du Protocole de Kyoto, et cela ne peut être ajourné. Il existe un groupe de pays développés dans ce processus de négociations, qui essaie de liquider le Protocole de Kyoto, sous le prétexte qu’il couvre seulement 20% des émissions de gaz à effet de serre. En réalité, la convention Marco couvre 100% de ces émissions et il s’agit d’un simple prétexte égoïste.
De Cancun doit sortir au moins, une feuille de route claire et précise vers une solution des problèmes essentiels du changement climatique, pour la 17° COP à Durban, dans un an.
Combattre le changement climatique implique qu’on affronte la pauvreté et l’inégalité sociale, implique l’obligation de transfert technologique du Nord industrialisé vers le Sud sous-développé, demande de faciliter les emprunts financiers qui permettent aux économies en développement de s’adapter et de faire face au réchauffement et de donner un financement frais, en plus des engagements déjà existants et chaque fois plus précaire et plus conditionnés de l’Aide Officielle au Développement.
S’il semble possible que lors de cette conférence, on puisse arriver à des accords en atière d’adaptation et de transfert de technologies, il est indispensable que nous définissions des mécanismes de financement ou de prêts réellement significatifs pour affronter les effets du changement climatique.
Ces mécanismes ne pourraient fonctionner au sein de la Banque Mondiale ni d’aucune autre institution du système de Bretton-Woods car il entraînerait des conditions à remplir, des discriminations et des exclusions. Les institutions de Bretton-Woods sont aussi responsables historiquement des changements climatiques que les gouvernements des pays développés.
Il ne s’agit pas d’une oeuvre de charité mais avant tout d’une obligation morale et juridique résultant des engagements assumés dans la Convention. Les miettes promises à Copenhague furent extrêmement petites et ne se sont même pas matérialisées, ni les mécanismes du marché ni les politiques néo-libérales qui n’ont aucune crédibilité ne nous aideront à avancer.
Monsieur le Président :
Les terribles inondations que subissent, en ce moment même, le Venezuela et la Colombie, appellent toute notre solidarité et mettent en évidence l’urgence du problème.
L’ordre mondial est insoutenable, la société humaine, pour survivre, devra s’organiser d’une autre manière. C’est le moment de passer aux actes, c’est la fin du temps. On a perdu un an de plus depuis la tromperie de Copenhague, les peuples ne peuvent attendre pour faire plaisir aux puissants.
Merci beaucoup.
(traduction Gaston Lopez)
Source : http://www.editoweb.eu/vive_cuba/
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